Un apiculteur occasionnel
Cet ancien bûcheron de 74 ans consulte car il présente depuis quelques semaines une pulpite bilatérale du pouce, de l'index et du majeur, ainsi qu'un eczéma du dos des mains et du visage de localisation particulière atteignant la zone centrale du front, les ailes du nez, la zone péribuccale et le menton. Son médecin traitant lui a prescrit un corticoïde injectable et un antihistaminique pendant 10 jours sans succès. Ce patient très proche de la nature possède quelques ruches dont il s'occupe avec « amour » en récoltant le miel.
Lors de la consultation, le patient se frotte régulièrement de haut en bas le front, le nez, la bouche pour finir par le menton, zones correspondant aux localisations des lésions du visage. Les tests cutanés réalisés en patchs avec la batterie standard ICDRG, l'extrait commercial propolis et la cire d'abeille amenée par le patient sont positifs après 48 heures pour le baume du Pérou, la propolis et la cire d'abeille. Les lésions des mains sont secondaires à la manipulation des rayons de miel et au contact avec la propolis avec phénomène manuporté au visage.
L'allergie à la propolis
Le terme « propolis » vient du grec et signifie « défense de la ruche ». Cette substance résineuse est recueillie sur les bourgeons des arbres par les abeilles, puis mastiquée, digérée pour ensuite colmater les interstices des ruches et se mélanger avec la cire d'abeille. Elle est constituée d'une quarantaine de substances comme le cinnamate de cinnamyle, la tetochrysine, l'ester diméthylallique de l'acide caféique. Certaines de ces substances se retrouvent dans le baume du Pérou d'où la possibilité d'allergie concomitante à ces deux substances.
La propolis est utilisée pour ses propriétés anti-inflammatoires, cicatrisantes, anti-infectieuses, etc. Elle se retrouve volontiers dans de nombreuses « préparations » stimulant l'immunité, les pelotes de pollen, la cire d'abeille (attention à certaines coldcream qui en contiennent), certains miels, les résines de peupliers, etc. Elle est aussi utilisée depuis l'époque de Stradivarius dans la composition de vernis pour instruments à cordes.
Le premier cas d'allergie à la propolis est évoqué dans les années 1930.
Cet eczéma de contact atteint les mains et le visage par phénomène manuporté. Il est de type retardé et son diagnostic repose sur la chronologie des événements corrélée à la positivité de patch tests. Le traitement repose sur l'application locale de dermocorticoïdes et sur l'éviction de l'allergène difficile à obtenir chez ce patient passionné.
L'allergie au baume du Pérou
Cette allergie de contact accompagne souvent l'allergie à la propolis. Le baume du Pérou, comme son nom ne l'indique pas, est extrait d'un arbre, présent en Colombie, au San Salvador ou au Venezuela : le Myroxylon Pereirae. Ses différents composants sont souvent mis en cause dans les allergies aux cosmétiques et aux parfums. Il est à l'origine d'eczéma de contact (comme celui des lèvres après utilisation d'un stick labial très répandu) ou d'urticaire de contact.
Certains aliments tels que les épices, les agrumes, les clous de girofle, certains apéritifs contenant des aromates, la cannelle, les chewing-gums, le miel, le pain d'épice, la vanille peuvent réactiver des lésions d'eczéma au baume du Pérou en raison de la présence de molécules identiques : aromatiques, cinnamiques, vanilliques, etc. Des allergies croisées avec la teinture de benjoin, le baume de Tolu, la colophane, sont également possibles.
Le patch test est dilué à 25 % dans de la vaseline blanche en cas d'eczéma de contact ; le test ouvert à lecture immédiate 20 à 30 minutes est réservé à l'urticaire de contact.
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