« Nous avons développé CANARY (Cellular Analysis and Notification of Antigen Risks and Yields), un nouveau type de détecteur pouvant déceler des bactéries et des virus », explique au « Quotidien » Todd Rider, qui a dirigé ces travaux au MIT (Massachusetts Institute of Technology) à Lexington. « Tandis que les méthodes actuelles de détection peuvent prendre plusieurs heures et ne sont souvent pas très sensibles, CANARY donne une réponse dans la minute et peut même détecter quelques rares particules virales ou bactéries », souligne-t-il.
Pour réussir cette performance, les chercheurs ont exploité les lymphocytes B vivants, modifié génétiquement afin qu'ils expriment :
1) dans leur cytoplasme, une æquorine, protéine trouvée chez la méduse qui devient luminescente sous l'influence du calcium ;
2) à leur surface membranaire, des anticorps spécifiques pour les pathogènes souhaités.
Emission de lumière
Lorsque ces anticorps sur les cellules B se lient au pathogène approprié, la concentration intracellulaire de calcium augmente en quelques secondes, et la protéine æquorine émet de la lumière.
Les cellules modifiées détectent les pathogènes avec une rapidité, une sensibilité et une spécificité excellentes et sans égal actuellement.
Par exemple, des cellules B spécifiques pour la bactérie Yersinia pestis (agent de la peste) peuvent détecter une quantité aussi minime que 50 unités formant des colonies (UFC), en moins de trois minutes. La sensibilité s'élève à 99 % pour 200 UFC, avec un taux de faux-positif de seulement 0,4 %.
Des cellules B spécifiques pour une souche pathogène de E. coli (0157 : H7), contaminant parfois légumes, fruits et viandes, peuvent déceler seulement 500 UFC/g dans la laitue.
Autre exemple notable, le CANARY peut détecter une quantité minime de spores de B. anthracis (1 000 UFC) produits par un écouvillon nasal, ce qui démontre que ce test pourrait être un outil précieux pour rapidement dépister une exposition au charbon inhalé chez des patients.
Petit détail pratique, ces préparations cellulaires peuvent être conservées à température ambiante pendant deux jours, à froid pendant deux semaines, et congelées indéfiniment sans perdre leur activité.
Un prototype en développement
« Nous sommes en train de mettre au point le matériel prototype d'un petit détecteur CANARY qui pourra maintenir en vie les cellules B, recueillir les échantillons à analyser, et surveiller l'émission de lumière par les cellules », confie au « Quotidien » le Dr Rider. « Nous sommes aussi en discussion avec des compagnies qui souhaitent utiliser cette technologie pour des applications variées. »
« Puisque notre méthode est très rapide, sensible et spécifique, les applications sont nombreuses. Par exemple, elle pourrait être utilisée pour tester dans des prélèvements sanguins le VIH, ou dans des prélèvements urinaires le chlamydia », affirme-t-il. « Le CANARY pourrait aussi être utilisé pour surveiller les pathogènes dans l'air ou l'eau, pour se protéger par exemple du bioterrorisme », ajoute-t-il.
« Science » du 11 juillet 2003, p. 213.
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