Lorsque Robert Guthrie décrit pour la première fois une méthodologie simple et peu coûteuse de dosage de la phénylalanine à partir d'un éluat de sang séché et recommande la mise en place d'un dépistage systématique chez tous les nouveau-nés, son pari tient de la gageure. Personne n'ose prédire à cette époque qu'une telle stratégie sera efficace et permettra aux enfants atteints d'oligophrénie phénylpyruvique (aujourd'hui la phénylcétonurie ou PCU), repérés dans les 15 premiers jours de vie puis traités pendant au moins une décennie (régime spécifique « pauvre en phénylalanine » décrit en 1958 par H. Bickel), de devenir des adultes normaux, épargnés par l'inéluctable et progressive dégradation psychomotrice à laquelle ils étaient promis.
Le dépistage de la PCU introduit dès 1966 à Lille, à Lyon et à Paris s'est progressivement étendu à l'ensemble du territoire (1978), grâce à l'AFDPHE (créée en 1975) et ses associations régionales et avec le soutien du ministère de la Santé et de la Caisse nationale d'assurance-maladie.
Quatre maladies
La « belle histoire » s'est renouvelée pour seulement quatre maladies, compte tenu de la rigueur des critères exigés pour le dépistage : maladie fréquente et grave susceptible d'être diagnostiquée à la phase présymptomatique et bénéficiant d'un traitement. La méthode de dépistage doit reposer sur un marqueur spécifique et facile à doser, elle doit être fiable, peu onéreuse et applicable au plus grand nombre, pour le bénéfice de l'individu et celui de la société. Aujourd'hui, le dépistage est donc systématique pour la PCU, l'hypothyroïdie (HC), l'hyperplasie des surrénales (HCS) et, depuis 2003, la mucoviscidose. Pour la drépanocytose, il n'est systématique que dans les DOM-TOM. En métropole, il est réalisé chez les nouveau-nés de familles à risque.
Selon un bilan publié pour la première fois par l'AFDPHE, allant de 1967 au 31 décembre 2002, 25,5 millions de nouveau-nés ont pu être dépistés et 9 355 malades repérés : 1 576 atteints de PCU (dont 29 formes malignes) sur les 26 millions dépistés, soit une incidence de 1/1 6072) ; 5 182 malades sur les 8 960 679 dépistés pour l'hypothyroïdie congénitale, 468 malades/7 156 409 pour l'hyperplasie des surrénales. Près de 1 million de tests ont été réalisés pour la drépanocytose, avec un rendement de 1 cas sur 800 testés.
Un programme efficace
Pour la seule année 2002, le dépistage systématique a concerné 817 050 enfants. Parmi eux, 93 PCU, 255 HC et 48 HCS ont été repérés, soit au total 396 malades. Les chiffres obtenus pour les années 1999, 2000 et 2001 confirment l'exhaustivité du dépistage (100 %). Il est réalisé à J3 dans plus de 98 % des cas, conformément aux recommandations nationales et analysé dans les 24 heures qui suivent la réception du prélèvement (sauf pour les DOM-TOM où le délai est plus long). La preuve est faite que ce type de dépistage est efficace, même s'il n'est pas légalement obligatoire.
Les 4 laboratoires interrégionaux (Lille, Marseille, Paris et Créteil) chargés du dépistage de la drépanocytose ont effectué en métropole 168 574 tests et repéré 223 syndromes drépanocytaires majeurs. Sur les 780 000 nouveau-nés annuels, la proportion d'enfants ciblés à risque est donc de 21,6 %.
Quant au dépistage de la mucoviscidose, qui a commencé dans quelques régions en 2002, il a déjà été réalisé pour 376 402 enfants et a permis de repérer 88 malades.
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