« Paroles/Protocoles : singularité des soins psychiatriques » : à lui seul, le thème de la session scientifique (FMC) de la Fédération Croix-Marine (1), qui se tiendra à Clermont-Ferrand le 28 mars, évoque la raison d'être du mouvement d'aide à la santé mentale né il y a cinquante ans dans la métropole auvergnate.
Là où la FASM Croix-Marine privilégie la parole du patient en recourant à la psychothérapie institutionnelle, dans les hôpitaux, les institutions et les secteurs de psychiatrie, celle-ci est balayée par une médicalisation des soins psychiatriques, explique en substance son président, le Dr Clément Bonnet. « Ce qui domine actuellement, souligne-t-il, c'est uneapproche neurobiologique, comportementaliste et pharmacologique. La psychothérapie passe au second plan. »
Des citoyens à part entière
La démarche de Croix-Marine consiste à « humaniser la vie dans les hôpitaux psychiatriques, en créant des associations loi 1901 regroupant les patients et leurs familles, les professionnels et les militants de la société civile ». A ce jour, trois cents lui sont affiliées. La Fédération multiplie les structures d'insertion de type CAT, foyers protégés et placements familiaux, « voies d'accès à la citoyenneté des patients et des personnes handicapées psychiques ». Et, en ouvrant la scène du théâtre de la Maison de la culture de Clermont-Ferrand, le 28 mars, à une troupe de patients autistes pour son cinquantenaire, la FASM Croix-Marine témoigne de sa volonté de faire des malades mentaux des citoyens à part entière. Elle qualifie d' « indispensable la pluridisciplinarité du travail d'équipe en santé mentale et en psychiatrie ». Ses activités de formation annuelles - cette année, autour du thème « Désespoir et dépression», à Lyon, du 19 au 21 septembre - s'adressent aussi bien aux infirmiers, secrétaires et psychiatres, qu'aux ergothérapeutes, psychologues, directeurs d'établissement hospitalier et aides-soignants. En fait, c'est toute la collectivité qui doit être concernée et participer au changement. Il appartient à chaque personne, « si elle ne veut plus avoir peur de l'autre, de modifier la représentation qu'elle a des malades mentaux, du handicap psychique et des exclus ». Le 17 juin, les Valenciennois sont conviés à y réfléchir aux côtés de leur maire-adjoint, Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la Rénovation urbaine, en participant à un débat intitulé « Politique de la ville et santé mentale », organisé par la FASM Croix-Marine. Quelques jours plus tôt, le 13 juin, c'est autour du thème « Risque et santé mentale » que les délégations régionales Croix-Marine demanderont à la population de s'interroger sur le recours au « protocole » : « A-t-il pour objet premier d'améliorer les soins, ou de diminuer le risque d'avoir des ennuis ? »
Conjuguer sanitaire et social
De l'avis du Dr Clément Bonnet, responsable de l'association de santé mentale gestionnaire du secteur de psychiatrie du 13e arrondissement de Paris, il est impératif de conjuguer le sanitaire et le social. Sans quoi, un psychotique traité dans un service de psychiatrie, seul, sans ressources, sans famille, restera confiné dans la filière psychiatrique. « En 2003, il faut, insiste-t-il , que les patients ne soient plus stigmatisés en tant que malades psychiatriques. » Les portes de centres d'hébergement et de réinsertion sociale ou de logements associatifs en milieu urbain (2) doivent s'ouvrir aux schizophrènes et autres patients difficiles ayant des problèmes au long cours. Municipalités, bailleurs sociaux et citoyens bien portants sont concernés, comme le corps médical, d'ailleurs. « Il convient de faire en sorte qu'on considère toujours la personne, et ne jamais raisonner sur un cas ou partir de symptômes », se laisse aller à dire le Dr Clément Bonnet à l'adresse de ses confrères. Evidemment, la pénurie de psychiatres ne facilite pas les choses. Nombre de postes sont vacants dans les hôpitaux, fragilisant le système. Les praticiens en exercice sont moins disponibles, se cantonnent souvent aux urgences. Les équipes Croix-Marine, elles, tentent d'aller au-delà du traitement de la crise.
(1) Tél. 01.45.96.06.36.
(2) La FASM Croix-Marine dispose de 2 500 places en logements associatifs.
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