« Chaleur du sang », d'Irène Némirovsky

Un autre inédit

Publié le 09/04/2007
Article réservé aux abonnés
1276107527F_Img258125.jpg

1276107527F_Img258125.jpg

1276107527F_Img258131.jpg

1276107527F_Img258131.jpg

IL EST TOUJOURS intéressant de remonter aux sources de la découverte d'un inédit.

On sait que l'auteur, née en 1903 à Kiev, a connu le succès dès son premier roman, « David Golder » (1929), puis avec « le Bal » (1930). C'est dans le village du Morvan où elle s'était réfugiée après l'exode et où elle a écrit « Suite française » qu'elle a dû finaliser ce récit, durant l'été 1941. Elle sera arrêtée peu après par les gendarmes français, puis assassinée à Auschwitz pendant l'été 1942.

On a redécouvert récemment deux inédits d'Irène Némirovsky (son oeuvre compte quatorze romans, une biographie de Tchekhov et de nombreuses nouvelles), « le Maître des âmes » et, il y a seulement trente mois, « Suite française ». « Chaleur du sang » n'est pas sorti du chapeau d'un prestidigitateur pour relancer les ventes.

Le livre était connu de Denise Epstein, l'unique fille d'Irène Némirovskiy encore vivante, mais qui n'en possédait qu'un tapuscrit incomplet, qui s'arrêtait au milieu d'une phrase, au tiers de l'actuel roman. Il avait été tapé par Michel Epstein lui-même, le mari d'Irène Némirovsky, déporté trois mois après elle et qui mourra aussi à Auschwitz. Quant au manuscrit, il avait été confié par son auteur fin 1941 ou début 1942, à André Sabatier, son éditeur chez Albin Michel. On l'a retrouvé en 2005 dans un ensemble de cartons déposés à l'Imec et qui contenaient aussi, entre autres, le manuscrit original de « David Golder ».

« Chaleur du sang » se déroule au début des années 1930, sous le regard d'un vieil homme détaché, mais observateur, venu finir ses jours dans sa région natale. Venus lui présenter leur futur gendre, le falot et timide Jean Dorin, ses cousins évoquent la genèse de leur couple : leur fugitive et chaste rencontre trente ans plus tôt, suivie du départ à l'étranger de François et du premier mariage d'Hélène avec un paysan vieux et riche, puis, quelques années plus tard, le veuvage d'Hélène et les retrouvailles avec son amour de jeunesse.

Le bonheur tranquille de leur fille ne dure pas longtemps : quelques mois après le mariage, son époux se noie dans la rivière. Un témoin finit par révéler que le drame a eu lieu après que Jean s'est battu avec un autre homme. L'un après l'autre, les lourds secrets qui unissent malgré eux les protagonistes vont resurgir dans le récit du vieil homme, jusqu'à une ultime et troublante révélation.

On trouve dans « Chaleur du sang » tous les éléments qui annoncent le drame de « Suite française ». C'est la même oeuvre visionnaire – qui a été entreprise dès 1937 –, noire et désenchantée, en phase certainement avec le drame que vivait alors l'auteur.

Editions Denoël, 155 p., 15 euros.

> M. F.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8143