LA BANLIEUE que montre Isabelle Czajka dans son premier long métrage, primé en tant que tel au Festival de Locarno, n’est pas celle des cités. C’est celle du monde marchand, où centre commercial, grande surface et enseignes publicitaires dévorent l’horizon et le quotidien des habitants de la zone.
Emmanuelle a 17 ans et dans ce décor sans âme attend le bus qui va la mener à l’hôpital voir son père. Ce dernier meurt et c’est « l’année suivante » que raconte le film, la lente dérive d’une adolescente avec laquelle sa mère a du mal à communiquer. La jeune fille ne s’adapte pas à la vie sans son père ou plutôt à une vie familiale différente de celle qu’elle a toujours connu. Elle ne se révolte pas, elle s’isole plutôt dans une sorte d’aboulie tout en faisant à peu près, dans un premier temps, ce qu’on attend d’elle : aller au lycée, faire des courses ou partir en vacances avec sa mère.
La mère, elle, s’efforce de tourner la page, ce qui la conduit à une attitude égocentrique vis-à-vis de sa fille. Et quand elle tente d’entrer en contact avec elle, sa seule manière de lui témoigner de l’affection est de l’emmener au centre commercial pour lui acheter une robe.
La réalisatrice fait un parallèle entre la banlieue – du moins celle qu’elle montre –, espace « adolescent » en pleine mutation, où l’on ne se sent jamais à sa place, et l’adolescence, période où «on est encombré par son corps, (...) et on n’est jamais bien là où on est». Mais qu’on se rassure, son film n’est en aucun cas une argumentation et les dialogues ne sont jamais démonstratifs. Les images parlent d’elles-mêmes et le visage buté de la jeune Anaïs Demoustier, sa présence dans les scènes les plus quotidiennes sont suffisamment expressives. Face à elle, Ariane Ascaride a le rôle ingrat de la mère peu compatissante, dont elle se tire avec son intelligence habituelle.
Un film sensible, qui ne raccole pas à l’émotion. Attention, il risque de ne pas rester longtemps sur les écrans, balayé par les blockbusters. > R. C.
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