« Nos résultats révèlent un rôle inattendu de l'oleyléthanolamide (OEA) dans la régulation périphérique de l'appétit et fournissent une trame pour développer des thérapeutiques visant les troubles de l'alimentation ». Il est vrai que les résultats d'une équipe hispano-américaine (Madrid et Irvine, Californie), publiés dans le dernier « Nature », reposent sur une approche différente et nouvelle de l'appétit.
F. Rodriguez de Fonseca et coll ont fondé leurs travaux, chez le rat, sur des études montrant qu'un acide gras éthanolamide (FAE) polyinsaturé, l'anandamide, ligand endogène aux récepteurs cannabinoïdes, est impliqué dans la régulation de l'appétit. Mais ces effets pharmacologiques de FAE saturés ou monoinsaturés, tels que l'OEA, ne peuvent être justifiés par l'activation d'un des sous-types de récepteurs cannabinoïdes connus. D'où le souhait des chercheurs de rechercher les effets de L'OEA sur la consommation de nourriture.
De façon dose- et temps-dépendante
Le premier constat est que l'injection périphérique d'OEA bloque l'alimentation des rongeurs, de façon dose- et temps-dépendante. Comme des injections d'anandamide ou d'acide oléique sont dépourvues d'effets, cela suggère que « l'OEA réduit l'appétit de façon structurellement sélective et que les prérequis moléculaires pour cet effet sont distincts de ceux impliqués dans l'interaction de l'anandamide avec les cibles cannabinoïdes connues ».
Les auteurs se sont demandé si l'effet anorexigène n'était pas plutôt lié à l'apparition d'un nouveau comportement de l'animal, tel qu'un phénomène de dégoût. Une telle hypothèse semble éliminée par le fait que de fortes doses d'OEA avaient peu d'effet. En outre, elles n'ont pas créé de symptôme d'ordre anxieux, n'ont pas affecté l'axe hypothalamo-hypophyso-adrénergique et n'ont modifié ni la température corporelle, ni le seuil de la douleur, ni la glycémie.
L'OEA a en outre réduit l'activité des rats. Mais ce ralentissement ne peut avoir induit l'anorexie pour deux raisons. Tout d'abord, la consommation d'eau n'a pas été modifiée, ensuite, la destruction des fibres sensorielles par la capsaïcine, a supprimé l'effet anorexigène de l'OEA, sans rétablir l'activité motrice. « Ce profil pharmacologique différencie l'OEA des autres suppresseurs de l'appétit tels que les amphétamines... et les cannabinoïdes tels que l'anandamide », précisent les auteurs.
Un effet anorexigène médié par les fibres sensitives
Restait à rechercher une action centrale de l'acide gras. Injecté dans un ventricule cérébral, l'OEA ne montre aucun effet. Ce qui a conduit les auteurs à rechercher les sites primaires d'action hors du système nerveux central. La capsaïcine a ici encore été utilisée. La destruction des fibres sensitives a empêché l'action de l'OEA. Confirmant un effet anorexigène périphérique, médié par les fibres sensitives, lesquelles stimuleraient des aires cérébrales impliquées dans l'inhibition de l'appétit. Il est intéressant de noter que la baisse d'activité des rongeurs traités n'a pas été modifiée par la destruction des fibres périphériques.
En dernière étape, les chercheurs ont dosé l'OEA au niveau de l'intestin grêle. Son action anorexigène est, en effet, évocatrice de celle de peptides intestinaux, tels que les CCK. Ils en ont trouvé des taux élevés chez des rats alimentés à volonté et bas chez ceux contraints au jeûne (avec ré-élévation après alimentation). Jeûne et alimentation régulent donc la biosynthèse d'OEA dans l'intestin grêle
« Nature », vol. 414, 8 novembre 2001, pp. 209-212.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature