L' ETUDE s'est déroulée à Adélaïde, en Australie, dans une situation de relatif isolement qui permettait d'avoir un bon échantillonnage des différentes prises en charge des troubles du comportement alimentaire. Pendant vingt-sept mois, des femmes répondant aux critères de l'anorexie, de la boulimie ou de trouble du comportement alimentaire non spécifié (TNS) ont été incluses dans l'étude, à condition d'être consentantes et d'accepter des consultations de suivi à six mois et cinq ans, entrecoupées d'entretiens téléphoniques tous les ans à compter de la date d'inclusion. L'évaluation initiale faisait appel au score de Morgan-Russell-Hayward (17 items comprenant le poids, les habitudes alimentaires en fréquence et quantité, l'état psychique et psychosexuel, le rythme des menstruations, les relations familiales et professionnelles), à un autoquestionnaire sur l'image corporelle (44 items sur l'attitude face au corps), au Finders Symptom Score (13 items sur les symptômes des troubles du comportement alimentaire du DSM-III) et à des questionnaires d'autoévaluation sur l'estime de soi, l'humeur et les émotions.
Anorexie, boulimie, trouble non spécifié
Au total, 220 patientes répondant aux critères d'inclusion ont accepté de participer à l'étude : 95 anorexiques, 88 boulimiques et 37 troubles non spécifiés (EDNOS : Eating Disorders Not Otherwise Specified). A l'inclusion, 59 % des anorexiques étaient des « restrictives », 41 % des « vomisseuses » et toutes les boulimiques prenaient des laxatifs. Le diagnostic de TNS était porté après six mois de suivi si la patiente avait sauté plus d'un repas par jour, un nombre prépondérant de jours par mois ; fait une crise de boulimie plus d'une fois par mois ; s'était fait vomir ou avait pris des laxatifs quelle que soit la fréquence.
Toute la difficulté de l'étude consistait ensuite à catégoriser les différents traitements car le seul critère « durée de prise en charge » pouvait induire une confusion avec la sévérité du trouble. Les investigateurs australiens ont donc choisi de différencier les femmes hospitalisées pendant au moins six mois et ayant atteint un indice de masse corporelle satisfaisant (supérieur à 16) des autres. Les patientes étaient secondairement sélectionnées en fonction de l'intensité du traitement : absence (1), de 1 à 3 consultations externes par semaine (2), plus de 3 cessions externes par semaine (3), hospitalisation courte (4), hospitalisation prolongée de plus de quinze jours (5). Les boulimiques et les TNS ont bénéficié de prises en charge à prédominance légère (1, 2, 3) alors que les anorexiques ont reçu des traitements plus lourds.
Le bilan à cinq ans
A cinq ans, 5 patientes étaient décédées dont 4 des suites directes des troubles (2 anorexiques et 2 TNS) ; toutes ces femmes avaient eu auparavant une période d'hospitalisation prolongée. La moitié des anorexiques ne répondait plus aux critères diagnostiques de l'un des troubles du comportement alimentaire mais leurs tests d'évaluation étaient médiocres ou mauvais. Les résultats avec les boulimiques étaient plus optimistes : aucun trouble du comportement alimentaire ne pouvait encore être diagnostiqué chez les trois quarts d'entre elles. Néanmoins, un certain nombre l'était toujours et près de 10 % souffraient de TNS. Les résultats obtenus avec les TNS sont d'interprétation difficile car ils reflètent probablement plusieurs troubles du comportement. Bien que les trois quarts étaient également « guéries », certaines patientes étaient devenues anorexiques et d'autres boulimiques. Pour les trois types de troubles, le choix du traitement n'a eu aucune influence sur les résultats obtenus. Chez les anorexiques, l'étendue et l'intensité des symptômes initiaux étaient des facteurs prédictifs plus importants que la durée des troubles. Les anorexiques, en revanche, avaient une évolution d'autant plus mauvaise que leur image corporelle et leur vie psychosociale étaient affectées. Aucun facteur prédictif n'a été trouvé pour les TNS.
David Ben-Tovim et coll., « The Lancet », vol. 357, 21 avril 2001.
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