PRATIQUE
Au cours du vieillissement
Au cours du vieillissement, la marche se modifie, même chez les sujets âgés en bonne santé.
Selon une étude toulousaine qui a établi des normes en fonction de l'âge (Costes-Salon M. C. et al. 1995), elle a tendance à devenir progressivement, dès la sixième décennie, plus lente, faite de petits pas, les temps d'appui augmentent notamment le double appui. Cependant, la marche conserve sa régularité, sa symétrie, et les différences liées au sexe persistent, les femmes ont une cadence plus élevée due à des pas plus courts et des temps d'appui et de balancement plus brefs.
Il faut savoir reconnaître un trouble de la marche chez un patient âgé afin de prévenir les chutes qui peuvent avoir des conséquences graves de perte de l'autonomie.
Regarder marcher le patient
L'examen clinique de la marche n'est pas simple, il demande « une formation » à l'observation et aux différents tests, et surtout pour savoir les interpréter. Il est essentiel de regarder marcher le patient, de l'examiner ainsi que ses pieds. Les paramètres étudiés sont la vitesse de la marche, le cycle de la marche, la longueur du pas, le temps d'appui total, le temps de balancement, etc. Un examen complet consiste à faire marcher le sujet vers un but situé au moins à six mètres ; à lui faire tenir une station unipodale au moins cinq secondes ; à faire le test de « get up and go » ; et en cas de doute à réaliser le test de Tinetti et/ou le test moteur minimum, qu'on pourra compléter par une posturographie en cas d'anomalie (à demander à un centre spécialisé).
Des troubles à reconnaître
Les troubles de la marche à savoir reconnaître chez le patient âgé sont les suivants :
- les boiteries : qui sont dues aux problèmes rhumatologiques ou traumatiques (gonarthroses, coxarthroses ou raideurs de plusieurs articulations dont la cheville). Les troubles statiques souvent dus à une atteinte du rachis, entraînant une marche difficile, car douloureuse ;
- la démarche akinétique du syndrome extrapyramidal : elle est caractérisée par une démarche à petits pas, avec la perte du balancé des bras, un piétinement devant l'obstacle, des demi-tours en bloc, rigides, avec chutes fréquentes. L'examen neurologique doit être complet, la maladie de Parkinson est bien sûr à évoquer, mais aussi un effet secondaire d'un neuroleptique souvent très mal supporté chez les sujets âgés ;
- la démarche ataxique ou cérébelleuse : les déviations se font toutes du même côté, associées à un vertige rotatoire. L'ataxie cérébelleuse se distingue de l'ataxie proprioceptive car elle n'est pas aggravée par la pénombre et l'occlusion des yeux ;
- la démarche talonnante : la marche est sinueuse avec un élargissement du polygone de sustentation : les pieds retombent lourdement sur le sol ;
- la démarche spastique : la marche en fauchage de l'hémiplégique est le type de cette démarche ;
- l'astasie abasie : il s'agit de l'impossibilité de se tenir debout en l'absence d'anomalie à l'examen neurologique. L'association à un tableau de régression psychologique avec rétropulsion du tronc en position assise et, debout, un flessum des hanches et des genoux. Toute affection aiguë ou chronique peut entraîner ce tableau spécifique du sujet âgé. Le syndrome de l'après-chute, avec la peur de tomber, peut amener à ce tableau, en l'absence de rééducation ;
- il existe tous les autres troubles de la marche, identiques à ceux de l'adulte plus jeune : le steppage, la démarche dandinante ou démarche en canard, l'arrêt de la marche après un certain parcours due à une artérite par douleur aiguë du mollet.
Origines très diverses
1. Dysfonctionnement interne
Il faut d'abord rechercher un problème de squelette habituellement bien connu du patient, comme une arthrose des membres inférieurs, une ostéomalacie, ou un problème de pied, ou même une fracture engrenée souvent peu douloureuse.
Les troubles de l'équilibre sont ensuite à rechercher, avec la station unipodale, le test de « get up and go » et un examen neurologique : le syndrome vestibulaire est le plus fréquent, suivi par les effets iatrogènes des médicaments (la polythérapie est suffisante pour expliquer cet effet, par exemple un antihypertenseur associé à un ou deux psychotropes).
Le trouble de l'équilibre s'accompagne souvent d'une peur de tomber qui constitue en soit un facteur de risque de chute et bien sûr d'isolement. En effet, une étude a montré que la peur de tomber s'accompagne d'une augmentation de l'amplitude des oscillations dans le sens antéro-postérieur les yeux bandés. Ces sujets sont aussi plus gênés que les autres par la suppression des informations visuelles.
Les troubles cardio-vasculaires comme l'hypotension orthostatique ou les troubles du rythme cardiaque sont à rechercher.
Les troubles neurologiques (maladie de Parkinson, hémiparésie, dysfonctionnement sensoriel [problème de vue]) également.
2. Facteur externe
- Certains sujets âgés sont mal chaussés (les femmes par coquetterie vont mettre des talons hauts) ; il est important de les conseiller ;
- mauvaise taille de déambulateur, surfaces de sol hasardeuses, glissantes, mal éclairées...
Pour en savoir plus :
- Un livre : « Les Troubles de la posture et risque de chutes ». Serdi. Suppl. Année Gérontol. 1995.
- Deux articles : Martin-Hunyadi C. et al. « Les troubles de la marche du sujet âgé ». « Rev Gériat », 1998 ; 23 : 741-747. Bambis S., Schatz M.C., Strubel D. « Les marches pathologiques ». « Rev Gériat » 1992 ; 17, 7 : 365-372.
Test de la station unipodale
Demandez au sujet de se tenir debout sur un pied, les yeux ouverts, pendant cinq secondes.
- Réponse adaptée : normale.
- Equilibre instable : si nécessité de se tenir, continuer l'examen.
- Equilibre impossible : réponse pathologique à explorer.
Les troubles de la marche |
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Troubles de la marche | Pathologies à évoquer |
Les boiteries | Arthrose des MI Séquelle de traumatisme des MI et apparentés Artérite des MI Problème de pieds (hallux valgus, hyperkératoses ) |
Démarche akinétique du syndrome extrapyramidal | Maladie de Parkinson Démence à corps de Lwy Syndromes lacunaire Syndromes extrapyramidaux iatrogènes Maladie de Steel Richardson Sciatique Syndrome de la queue de chaval Hydrocéphalie à pression normale Démarche "sénile" |
Astasie abasie | Régression psychomotrice Toute affection aiguë ou chronique Syndrome de laprès-chute |
Démarche spastique | Hémiplégie Myélopathie cervico-arthrosique |
Démarche ataxique ou syndrome vestibulaire | Insuffisance vertébrobasilaire Trouble proprioceptif Labyrinthite Méningite Tumeur de langle pontocérebelleux Hémorragie labyrinthique |
Démarche cérébelleuse | AVC de type Wallenberg |
Autre troubles statiques | Troubles statiques du rachis Déficit visuel Démences Facteurs extérieurs Origine multifactorielle |
Démarche talonnante | Polyneuropathie sensitive, diabète carences,SEP |
Démarche dandinante | Myopathie (surtout cortisonique) Rhumatismes inflammatoires, ostéomalacie |
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