ENTRE 2003 ET 2006, le plan Cancer a entraîné des progrès décisifs grâce à la mobilisation de tous les acteurs et de l’Institut national du cancer (Inca) en particulier. Le chef de l’Etat s’en est réjoui hier en annonçant les grandes orientations qu’il entend donner à la lutte (voir encadré).
En matière de prévention, l’Inca fait état de 1,4 million de fumeurs en moins. Une stratégie complète de dissuasion du tabac a été mise en place, associant l’augmentation des prix, l’interdiction de la vente aux moins de 16 ans, des campagnes offensives menées par l’Inpes (Institut de prévention et d’éducation pour la santé) et des opérations ciblées en direction des jeunes et des femmes, et la multiplication des aides à l’arrêt. En matière de nutrition et face à la consommation excessive d’alcool, des repères précis et généralement bien compris ont été diffusés.
Toutes les femmes de 50 à 74 ans ont été sensibilisées à l’offre de dépistage du cancer du sein. La généralisation d’une démarche similaire pour le cancer colo-rectal, d’ici à la fin de l’année, est sur les rails. Dans la foulée, la formation des professionnels de santé, le contrôle de qualité des équipements, la deuxième lecture des mammographies comme le contrôle de la qualité des examens (Observatoire) ont fait des avancées qualitatives. L’accès à l’oncogénétique, est devenu une réalité, avec 94 sites de consultations répartis sur tout le territoire.
Le patient au coeur du dispositif.
Pour les soins, le progrès majeur a été de placer le patient au coeur du dispositif et de partir de ses besoins et de ses attentes. Un programme personnalisé lui est proposé systématiquement. La prise en charge adaptée aux enfants est rendue possible dans 32 centres spécialisés en cancérologie pédiatrique. Le traitement de la douleur, avec la mise en place d’au moins une consultation dans chaque département et la création de 127 postes de psycho-oncologue en 2004-2005, gagne du terrain, y compris à domicile. Des structures de coordination existent à tous les niveaux, au sein des établissements, entre établissements de recours (pôle régional de cancérologie) et entre tous les acteurs de la prise en charge, hospitaliers et libéraux (réseaux de cancérologie). En oncogériatrie, 9 centres bénéficieront à terme d’unités pilotes de coordination. L’Institut national finalise les critères de qualité auxquels les centres devront satisfaire pour être autorisés à traiter les malades. Ce travail aboutira à la publication de textes juridiques, et les premières accréditations devraient être délivrées par les agences régionales de l’hospitalisation en 2007. Dans le courant de l’année, l’Inca va diffuser des recommandations nationales de pratiques cliniques. L’accès des patients aux essais cliniques et aux traitements innovants est facilité par la réalisation, avec l’Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé), de protocoles temporaires de traitements.
Le parc d’équipements diagnostiques et thérapeutiques se modernise. Au cours des deux dernières années, plus de 1 300 salariés supplémentaires ont été recrutés, dont 250 médecins.
Le plan Cancer, c’est aussi l’optimisation des formations. Le nombre d’internes dans les filières de radiothérapie et d’oncologie médicale a progressé de 30 % entre 2003 et 2005. Entre 2004 et 2006, plus de 40 postes de PU-PH et maître de conférences des universités-praticien hospitalier ont été créés, ainsi que 22 postes de chef de clinique assistant dans les services de cancérologie. Une enquête a permis d’identifier les besoins des généralistes et le renforcement de leur formation continue en cancérologie.
L’accompagnement social n’a pas été négligé. L’image sociale du cancer change. L’accès à l’information est facilité par l’existence de kiosques Accueil Cancer dans les villes, d’espaces Rencontre Information dans les hôpitaux et d’un numéro de téléphone Cancer Info Service (0.810.810.821) proposé par la Ligue nationale contre le cancer. De nombreuses études en sciences humaines sont en cours, notamment avec l’ARC (Association pour la recherche sur le cancer), en vue d’améliorer la vie des patients et de leurs proches. Des mesures ont été prises pour le retour à la vie ordinaire. Un premier modèle de prothèse mammaire externe est intégralement remboursé depuis février 2005. La prise en charge intégrale de plusieurs modèles de prothèses capillaires est attendue pour l’année en cours. Dès à présent, les caisses peuvent compléter, au cas par cas, le remboursement forfaitaire (76 euros) sur leur fonds d’action sociale.
Dans le champ de la recherche, le plan 2003-2006 aura été porteur de 7 cancéropôles, qui assurent un continuum entre la recherche fondamentale et le lit du patient. L’Inca a mis en place les moyens nécessaires pour atteindre l’objectif d’un taux de 10 % de malades inclus dans des essais cliniques. Des équipes mobiles de recherche clinique (170 personnes fin 2006) seront constituées dans chaque cancéropôle et chaque patient aura la possibilité d’être inclus dans un essai.
Les priorités de Jacques Chirac
Le président, en se félicitant du bilan du plan Cancer, a annoncé les nouvelles orientations qu’il entend faire appliquer.
D’ici à l’été, un grand programme de lutte contre les addictions (tabac, alcool, cannabis) sera lancé. Pour le chef de l’Etat, l’addiction doit être considérée comme une maladie à part entière et il souhaite que des consultations d’addictologie soient accessibles dans toute la France. L’Agence nationale de la recherche doit consacrer à ce sujet un budget spécial.
En ce qui concerne la lutte contre le tabagisme, pas d’annonce spectaculaire, on le devine. Jacques Chirac souligne l’importance des concertations en cours, pour intensifier une lutte qui a déjà donné de bons résultats. Des mesures sont néanmoins promises prochainement.
Une autre priorité présidentielle est le dépistage des cancers. Il faut encore accentuer la mobilisation pour augmenter la participation des femmes. Une formation des délégués de l’assurance-maladie sera organisée en ce sens. Il est envisagé aussi d’élargir le champ du dépistage systématique, au cancer de la prostate, par exemple, au vu des résultats des expériences menées actuellement.
Un grand programme de recherche sur génome et cancer est annoncé, avec 5 millions d’euros supplémentaires (Prcd, Inca et ministère). Dans le domaine de la recherche, Jacques Chirac souhaite que tout soit fait pour augmenter la participation à la recherche clinique, afin que la France rattrape son retard sur les autres pays européens.
La généralisation au niveau national des bonnes pratiques de soins est également indispensable, et notamment pour les tumeurs rares.
Enfin, dernière grande orientation annoncée : la mise en place de l’accompagnement du retour à la vie quotidienne, avec un volet médical et un volet social. Un projet de loi pourrait être mis au point dès l’été, en se fondant notamment sur l’expérience pilote réalisée par la Ligue contre le cancer, pour une généralisation en 2007-2008.
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