ON CRAINT un moment, que le spectacle ne se contente d'une gentille fidélité qui le ferait pencher, à cause d'un décor d'apparence pauvre et d'un « naturel » dans le jeu, vers les feuilletons bâclés de la télévision que l'on vous sert avant le journal… Mais très vite, les interprètes imposent un ton différent. Et si la mise en scène ne manque pas de naïvetés, Irène Bonnaud excelle à diriger les interprètes vers des zones franchement tragiques, qui existent dans la pièce de Marcel Pagnol. Il a été à l'école du théâtre du côté de Shakespeare et des Grecs, ne l'oublions pas.
L'atout principal de cette production est sa distribution. L'histoire a été popularisée par les films : Fanny (Marie-Sophie Ferdane, fine et sensible), 19 ans, a été séduite, Marius (Stéphane Varupenne, braque et sincère, comme il convient). Il s'est sauvé. Il a pris le large, littéralement. Ils s'aiment, mais lui n'est pas sûr d'elle et pas très sûr de lui non plus. Elle espère les lettres, lit celles que reçoit rarement le père du marin, César (Gilles David, sobre et subtil). Fanny attend un enfant. Sa mère Honorine (Catherine Hiegel, humaine) veut la marier au maître voilier, Honoré Panisse (Andrzej Seweryn, bouleversant) qui sait qu'il est vieux (53 ans) mais tient à sauver la petite… Ajoutez, vous les connaissez, la soeur d'Honorine, Claudine (Sylvia Bergé, épatante), Escartefigue (Pierre Vial, très drôle), Monsieur Brun (Jean-Baptiste Malartre, sérieux et fin), le Docteur Venelle (Serge Bagdassarian, formidable en plusieurs autres rôles en plus).
La construction parfaite de la pièce, ses dialogues efficaces, drôles, savoureux, font merveille. On rit sans cesse et l'on est ému sans cesse. Les comédiens sont magnifiques, chacun dans son registre. Mais le sommet est atteint lorsque, à la fin, Fanny-Marie-Sophie Ferdane, voit revenir Marius, mais a choisi… elle atteint au sublime classique d'une Bérénice, qu'elle connaît. Panisse-Andrzej Seweryn sait la vérité des sentiments des jeunes. Il s'agoisse pour « son » fils. Lui aussi atteint au pur tragique. Sans jamais surligner.
Ainsi les comédiens, guidés par Irène Bonnaud, rendent-ils un superbe hommage, mérité, à Marcel Pagnol.
Vieux-Colombier, à 19 h le mardi, 20 h du mercredi au samedi, 16 h le dimanche. Durée 3 h entracte compris. (01.44.39.87.00/01). Jusqu'au 31 octobre.
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