« L E transport intracorporel de drogue (body packing) est bien connu en pratique douanière, dans les unités de consultations médico-judiciaires et des médecins légistes, mais peut passer inaperçu en milieu non spécialisé », rapportent R. Clément et coll. Ce moyen de dissimulation par ingestion ou introduction dans le rectum ou le vagin est utilisé par les trafiquants pour importer de la drogue dans un pays.
Un arrêt cardiaque réanimé en vol
A bord d'un avion, un jeune homme de 19 ans est victime de convulsions, puis d'un arrêt cardiaque. Réanimé en vol, il est hospitalisé dans le coma, à l'arrivée. Ses radiographies, thoracique et abdominale, paraissent normales, mais on trouve de la cocaïne dans ses urines. Le patient décède quelques heures plus tard. Diagnostic : état de mal épileptique. L'autopsie médico-légale découvre trente-six sachets de cocaïne, dans l'estomac. La cause du décès est une intoxication aiguë provoquée par la rupture de deux des sachets de cocaïne.
Le terme de syndrome du body packer introduit en 1981 par Wetli et Mittleman, désigne le tableau clinique d'intoxications qui sont souvent mortelles. Le pronostic est fréquemment lié à la rapidité du diagnostic, lequel peut être difficile. Un faisceau d'arguments anamnestiques et cliniques peut le suggérer. Les radiographies standard et la recherche de drogue dans le sang et l'urine le confirment.
Avions, aéroports ou hôtels à proximité.
Plusieurs points communs peuvent être observés. Les caractéristiques de ce syndrome concernent le plus souvent un homme de 20 à 35 ans, de retour de voyage d'un pays producteur de drogue ou servant de plaque tournante aux trafiquants. Ces accidents surviennent fréquemment dans les aéroports, les avions, les locaux des douanes et les hôtels situés près des aéroports.
La brutalité de survenue des signes cliniques est caractéristique et les convulsions sont fréquentes
La rupture des sachets n'est pas toujours responsable du décès : le latex, utilisé pour envelopper la drogue est une membrane semi-perméable permettant la fuite de la substance dans la lumière digestive et, ce, en l'absence de rupture. Le plus souvent, la drogue est protégée par deux enveloppes (préservatifs ou doigts de gant en latex) nouées à leur extrémité. L'air est piégé entre ces deux enveloppes. Sur les radiographies, la drogue radio-transparente se devine grâce à un double croissant d'air qui l'entoure. Les sachets se voient mieux dans la poche gastrique que dans la lumière intestinale où ils peuvent être masqués ou confondus avec les matières fécales.
Trois types de sachets correspondant à trois degrés de solidité sont utilisés par les trafiquants. Ils nécessitent des prises en charge thérapeutiques adaptées. Lorsque les sachets sont solides (type 2 et 3), l'évacuation par laxatif est recommandée. L'évacuation chirurgicale est indiquée pour les sachets les moins solides (type 1) ainsi qu'en cas de coma. En plus de l'évacuation des sachets, les soins de réanimation nécessaires pour lutter contre les conséquences de l'intoxication dépendent de l'état clinique et de la drogue impliquée.
Ainsi, l'anamnèse, les signes cliniques, l'analyse toxicologique et un abdomen sans préparation permettent le diagnostic de ce syndrome rencontré de plus en plus fréquemment. Il doit être détecté très vite en raison de son pronostic sévère. La méthode d'évacuation des sachets doit toutefois être prudente, car il est difficile d'apprécier la solidité de l'emballage de la drogue dans le tube digestif.
R. Clément, P. Fornes, D. Lecomte, « la Presse médicale », 17 février 2001 ; 30 ; n° 6, p. 264 -267.
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