Arthrites débutantes

Traiter tôt pour améliorer le diagnostic

Publié le 04/12/2005
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18° Congrès SFR
4-12 décembre 2005 à Paris

COMME LES précédentes qui concernaient la gonarthrose et la coxarthrose, ces recommandations sont le fruit de l'interprétation, par un groupe d'experts représentant dix pays européens, des données de la littérature internationale. La première étape de ce projet a consisté à délimiter le sujet ; dans le cas présent, les arthrites débutantes recouvrant un champ large, les recommandations ont concerné les arthrites indifférenciées pouvant évoluer vers des arthrites érosives et persistantes, telles qu'une polyarthrite rhumatoïde, un des principes adoptés étant que, au départ, les arthrites rhumatoïdes sont généralement indifférenciées. Après sélection des questions les plus pertinentes, une analyse systématique de la littérature a été effectuée (Pub Med, Medline, Embase, CINAHL, Cochrane) et 284 études ont pu être identifiées et évaluées. Des recommandations préliminaires ont été proposées sur la base de ces questions, puis discutées et reformulées par les experts, en attribuant à chacune d'elles un critère de force.
L'approche des arthrites s'est profondément modifiée ces dernières années du point de vue à la fois diagnostique et thérapeutique. Les critères diagnostiques actuels ne sont plus des critères de classification, comme ceux établis par l'ACR, par exemple, mais des critères permettant de définir pour chaque patient le diagnostic et le pronostic le plus probable devant une arthrite débutante. La précocité de la prise en charge est justifiée par les conséquences sur le pronostic à long terme, de l'allongement du délai précédant le diagnostic et de la mise en route de la thérapeutique. Trois ou quatre mois de délai de prise en charge changent le pronostic clinique et radiologique à cinq ans, comme l'attestent les études de suivi disponibles aujourd'hui. Les recommandations (voir encadré) insistent donc non seulement sur la précocité de la prise en charge, mais également sur la nécessité de l'évaluation régulière de l'activité des traitements et sur celle du maintien de la rémission (définie par un Ddass 28 inférieur à 2,6). Ce travail de recherche et de synthèse des données existantes sur le sujet a permis de faire des recommandations, mais aussi de souligner les données manquantes et de définir de nouveaux champs de recherche : nécessité de développer de nouveaux outils de diagnostic et de pronostic, de mieux connaître l'effet des glucocorticoïdes comme celui des approches non pharmacologiques, de réaliser des études sur l'efficacité comparative et le coût des différentes stratégies thérapeutiques.
L'objectif est de diffuser ces recommandations le plus largement possible auprès des médecins généralistes, des rhumatologues, des étudiants en médecine et des autorités de santé, via les sociétés savantes, les organismes de formation médicale continue (FMC) et la Haute Autorité de Santé (HAS).
Toutes les recommandations nécessitent, par définition, des mises à jour régulières au gré des travaux effectués sur le sujet. Ces recommandations sur la prise en charge des arthrites débutantes n'échapperont pas, bien sûr, à cette règle afin de s'adapter aux dernières données de la science.

Les points clés

1 - L'arthrite est caractérisée par la présence d'un gonflement d'une articulation associé à une douleur et à une raideur.
Les patients avec une arthrite de plus d'une articulation devraient être adressés à un rhumatologue et vus idéalement dans les six semaines après l'apparition des symptômes.
2 - L'examen clinique est la méthode de choix pour détecter les synovites. En cas de doute, l'échographie, le doppler et l'IRM pourraient être utiles pour détecter les synovites.
3 - L'exclusion d'autres maladies que la polyarthrite rhumatoïde requiert le recueil soigneux de l'histoire de la maladie, l'examen clinique, et doit inclure au moins les examens de laboratoire suivants : numération, formule sanguine complète, analyse des urines, dosage des transaminases, recherche d'anticorps antinucléaires.
4 - Pour chaque patient qui se présente avec une arthrite débutante chez le rhumatologue, les facteurs prédictifs d'une affection persistante et érosive suivants doivent êtres évalués : nombre d'articulations gonflées et douloureuses, vitesse de sédimentation ou protéine C-réactive, taux de facteur rhumatoïde et d'anticorps anti-CCP et érosions radiographiques.
5 - Les patients à risque de développer une arthrite persistante et/ou érosive doivent être placés sous traitement de fond aussi précocement que possible, même s'ils ne satisfont pas encore pleinement aux critères établis par les classifications de maladies rhumatismales inflammatoires.
6 - L'information du patient sur la maladie, son traitement et son pronostic est cruciale. Les programmes d'éducation qui visent à faire face au handicap lié à la douleur et à maintenir l'aptitude au travail peuvent être utilisés en intervention complémentaire.
7 - Les Ains sont à envisager chez les patients symptomatiques après évaluation de l'état gastro-intestinal, rénal et cardio-vasculaire.
8 - Les corticostéroïdes systémiques réduisent la douleur et le gonflement, et sont à considérer comme un traitement d'appoint (essentiellement temporaire) dans le cadre des traitements de fond. Les injections de corticostéroïdes intra-articulaires sont à envisager pour le soulagement des symptômes locaux de l'inflammation.
9 - Parmi les traitements de fond, le méthotrexate est considéré comme la « pierre angulaire » et doit être utilisé en première intention chez les patients à risque de développer une affection persistante.
10 - L'objectif principal du traitement de fond est l'obtention d'une rémission. L'appréciation régulière de l'activité de l'affection et des effets secondaires guide les décisions relatives au choix et aux modifications de stratégies thérapeutiques (traitements de fond, y compris les biothérapies).
11 - Les interventions non pharmacologiques, telles que la balnéothérapie, l'ergothérapie et les exercices dynamiques, peuvent être utilisés en adjonction des interventions pharmacologiques chez les patients avec une arthrite débutante.
12 - La surveillance de l'activité de l'affection doit inclure le comptage des articulations douloureuses et gonflées, l'évaluation globale du médecin et du patient, la vitesse de sédimentation et la protéine C-réactive. L'activité de l'arthrite doit être évaluée à intervalle de 1 à 3 mois, aussi longtemps que la rémission n'a pas été obtenue. Les dommages structuraux doivent êtres évalués par radiographie tous les six à douze mois au cours des premières années. L'évaluation fonctionnelle (par exemple, le Health Assessment Questionnaire) peut être utilisée pour compléter la surveillance de l'activité de l'affection et les dommages structuraux.

> Dr CAROLINE MARTINEAU

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7856