Surveillance par INR
Les anti-vitamine K (AVK) sont fréquemment utilisés dans le traitement curatif ou préventif des accidents thromboemboliques artériels ou veineux. Leur utilisation nécessite une surveillance biologique régulière par l'INR (International Normalized Ratio). Une valeur cible de l'INR comprise entre 2 et 3 est conseillée chez la majorité des patients.
Le choix
La complication majeure du traitement par AVK est l'hémorragie. De ce fait, avant une intervention de chirurgie buccale, se pose le problème de la conduite à tenir vis-à-vis de ce traitement : arrêt transitoire avec ou sans relais par une héparinothérapie (HNF : héparine non fractionnée, ou HBPM : héparine de bas poids moléculaire) ou poursuite avec ou sans diminution de la posologie.
Le choix entre ces différentes stratégies dépend du risque hémorragique (tableau 1) et du risque thromboembolique qui doivent être évalués chez chaque patient pour obtenir le meilleur rapport bénéfice/risque.
L'attitude thérapeutique recommandée en première intention est la réalisation des extractions dentaires en poursuivant un traitement AVK efficace. De nombreuses études récentes ont mis en évidence la possibilité de pratiquer les interventions de chirurgie buccale sans modification du traitement par AVK. Cette possibilité nécessite la mise en place d'un protocole opératoire strict et un INR stable, inférieur à 4. Des moyens d'hémostase locale sont systématiquement utilisés pour contrôler le risque hémorragique. Enfin, la continuité des soins est impérative.
Recommandations
Modalités de prise en charge d'un patient traité par AVK en chirurgie bucco-dentaire.
1. Un contact préalable avec le médecin responsable du suivi du traitement par AVK du patient est indispensable.
2. L'arrêt systématique du traitement par AVK avant une intervention de chirurgie buccale, parodontale ou implantaire n'est pas justifié.
3. La poursuite du traitement par AVK est recommandée dans les cas d'interventions de chirurgie buccale, parodontale ou implantaire, sauf en cas de risque médical associé, sous réserve de la coopération du patient et de la proximité d'une structure hospitalière capable de le prendre très rapidement en charge.
4. La valeur de l'INR doit être stable et inférieure à 4.
5. Un bilan biologique donnant au moins la valeur de l'INR est réalisé dans les 24 heures avant l'intervention chirurgicale.
6. Les techniques d'hémostase locale sont indispensables et systématiquement associées.
7. La continuité des soins doit être assurée. Tout patient traité par AVK ayant une complication hémorragique postopératoire doit pouvoir contacter un praticien compétent dans la gestion de ce type de patients ou un service hospitalier d'odontologie ou de stomatologie d'astreinte.
8. La prise en charge de ce type de patients peut se faire en pratique de ville par des praticiens disposant du plateau technique nécessaire (moyens d'hémostase locale, notamment), pour des patients dont l'INR est inférieur ou égal à 3 et pour des actes sans risque hémorragique ou à risque hémorragique modéré.
9. Une prise en charge hospitalière est recommandée si l'INR est supérieur à 3 et/ou si le risque hémorragique est élevé et/ou s'il existe un risque médical associé (notamment un patient traité par l'association AVK-agents antiplaquettaires).
10. L'instauration d'un relais du traitement par AVK à l'aide d'HBPM ou d'HNF en milieu hospitalier avant, pendant et après la phase chirurgicale est possible mais doit rester exceptionnelle.
11. Les anesthésies locorégionales sont déconseillées. L'anesthésique local doit contenir un vasoconstricteur, sauf dans les rares cas de contre-indication de son emploi.
12. Dans les cas d'avulsions dentaires, la mise en place d'un matériau hémostatique résorbable intra-alvéolaire doit être systématique. Toute plaie intrabuccale doit être suturée. Les fils de suture peuvent être résorbables ou non. Les points doivent être unitaires. Dans les cas d'interventions chirurgicales hémorragiques, l'utilisation de colle biologique et/ou d'agent antifibrinolytique est recommandée. Une compression locale doit être mise en place immédiatement en post-opératoire pendant au moins 10 minutes.
13. L'antibioprophylaxie est obligatoire lorsque la prévention de l'endocardite infectieuse est recommandée.
Prévention des risques hémorragiques.
14. Le contrôle de la douleur se fera par l'utilisation de paracétamol en première intention. L'acide acétylsalicylique est contre-indiqué. Les dérivés opiacés peuvent être prescrits (antalgiques de niveau 2 ou 3). Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ne doivent pas être utilisés à visée antalgique.
Si une prescription anti-inflammatoire se révèle nécessaire, les corticoïdes en cure courte doivent, en l'absence de contre-indication, être préférés aux AINS.
Dans les cas d'une prescription anti-infectieuse, des cas sporadiques d'augmentation de l'INR ont été rapportés après prise d'amoxicilline, de clindamycine ou d'érythromycine, les patients doivent en être informés et rester vigilants.
La prescription d'une antibioprophylaxie pour la prévention de l'endocardite infectieuse n'interagit pas avec l'hémostase et doit suivre les règles habituelles.
La prescription de miconazole chez des patients traités par AVK est formellement contre-indiquée.
Toute autre prescription doit faire rechercher une éventuelle interaction avec les AVK.
Traitement des complications hémorragiques postopératoires. 15. En cas d'hémorragie postopératoire, la règle est la reprise chirurgicale. Après anesthésie locale, la plaie est rouverte et vérifiée, les procédures d'hémostase locale sont ensuite reprises. Les conseils postopératoires sont renouvelés.
16. Une exploration de l'hémostase comprenant la mesure de l'INR et la numération plaquettaire doit être réalisée.
17. Dans le cas où le saignement persiste malgré la reprise de l'hémostase, le patient doit être hospitalisé.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature