DES PROGRÈS importants ont été accomplis, en particulier du point de vue de la recherche thérapeutique. Les traitements sont plus efficaces, mieux tolérés, et leur toxicité à court et à long terme est moindre. Les formulations plus simples permettent même de «traiter en une prise par jour, ce qui constitue une avancée remarquable lorsque l'on pense aux trente comprimés des premiers temps de l'épidémie», a souligné Anton Pozniak, directeur de recherche sur le VIH au Chelsea and Westminster Hospital (Londres). Vingt-cinq molécules sont aujourd'hui disponibles et la mortalité de patients traités, chez qui une bonne restauration immunitaire (taux de CD4 à 500/mm3) avait été observée, est, après six ans de suivi, identique à celle de la population générale. «La bonne nouvelle est que les traitements marchent, a souligné Anton Pozniak, mais seulement si les patients y ont accès et peuvent continuer à se traiter.» En dépit des avancées, on est encore loin de l'accès universel prévu d'ici à 2010.
Encore 9,7 millions de patients.
L'objectif de trois millions de personnes traitées dans les pays en développement a été atteint cette année – avec deux ans de retard par rapport à la date fixée –, mais ce nombre ne représente que 31 % des 9,7 millions de patients qui en ont besoin. La baisse spectaculaire du prix des médicaments de première ligne (moins de 100 dollars pour une trithérapie) risque de ne pas se reproduire dans le cas des nouveaux antirétroviraux plus coûteux (1 214 dollars) et qui, depuis l'application des accords sur la propriété intellectuelle en 2005, ne peuvent plus faire l'objet de copies génériques. Selon Benjamin Coriat, qui préside le programme Économie de la santé dans les pays du Sud de l'ANRS, «il est urgent de proposer de nouvelles flexibilités ou de trouver de nouveaux accords entre fournisseurs et utilisateurs, qui s'appliquent à l'ensemble des pays du Sud, dont les économies vont être prochainement confrontées à de dramatiques augmentations des budgets de santé». La constitution de «pools» de brevets est une des solutions proposées par le chercheur qui a été discutée lors de la conférence de Mexico. Unitaid s'est engagé à susciter ce type d'accord avec des entreprises qui acceptent de mettre en commun leurs brevets, notamment pour les ARV pédiatriques.
Mais c'est l'effet préventif des traitements, qui, pour l'heure, pourrait lui aussi stimuler les efforts vers l'accès universel. Une étude canadienne présentée à Mexico et publiée dans « The Journal of Infectious Diseases » a en effet montré qu'une augmentation de 50 à 75 % du nombre de patients mis sous ARV parmi ceux qui en ont besoin pourrait réduire de plus de 30 % le nombre de nouvelles infections. Selon le modèle mathématique utilisé, une couverture de 90 % ferait chuter l'incidence de 60 %. L'étude a été saluée par le Dr Elly Katabira, nouvelle présidente élue de l'IAS, la première issue du continent africain, qui y voit «un moyen de transformer les patients de cette région, souvent traités tardivement, en fervents défenseurs de l'approche combinée, prévention et traitement».
C'est d'ailleurs une des conclusions du colloque, traitement et prévention ne doivent plus être considérés séparément. La prévention de la transmission mère/enfant et la prophylaxie postexposition constituent d'ailleurs deux grands succès des antirétroviraux. Mieux traiter les patients implique de les dépister et de les diagnostiquer plus tôt. La discrimination, la criminalisation et les lois répressives contre les séropositifs vont à l'encontre de l'objectif. Des recherches préliminaires tentent également d'évaluer l'efficacité des ARV en traitement préventif (PrEP) administré juste avant une exposition, une utilisation qui fait, là aussi, l'objet de controverses.
Trio, un espoir en cas d'échec
L'essai Trio, présenté par l'ANRS (Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites virales) lors de la conférence de Mexico, représente une avancée thérapeutique pour les patients en échec thérapeutique.
«Pour la première fois, chez des patients en multi-échec et porteurs d'un VIH multirésistant, une combinaison thérapeutique inédite présente une efficacité comparable à celle observée chez des patients naïfs qui reçoivent un premier traitement», souligne l'ANRS. L'étude, conduite par le Pr Yazdan Yazdanpanah (centre hospitalier de Tourcoing, France), a concerné 103 patients suivis pour une infection par le VIH depuis dix-sept ans en moyenne, sous ARV depuis treize ans (médiane). Leur virus présentait de nombreuses mutations de résistance aux trois principales familles d'ARV. Dans le cadre de l'essai, ils ont reçu trois nouvelles molécules, dont deux étaient en ATU avant le début de l'étude (le darunavir, un nouvel IP stimulé par une faible dose d'un autre IP, le ritonavir ; l'étravirine, nouvel INNTI ; le raltégravir, un anti-intégrase, nouveau type d'ARV). à 24 semaines de traitement, 90 % des patients avaient une charge virale indétectable (50 copies d'ARN VIH/ml) et une augmentation médiane des CD4 de 99/mm3 (médiane).
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