Les anthracyclines, en particulier l'épirubicine, administrés à fortes doses, ont permis d'améliorer la survie des patients cancéreux. Cependant leur cardiotoxicité constitue un facteur limitant.
Deux études publiées dans « Annals of Oncology » confirment le risque d'insuffisance cardiaque induite par ces molécules et suggèrent qu'un traitement par des inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC) de l'angiotensine permet de restaurer efficacement la fonction cardiaque de ces patients, mais surtout qu'un diagnostic précoce est possible (dosage de la troponine I) avant que la maladie ne s'installe.
La première étude réalisée par l'équipe du Dr Benny Jensen (université de Copenhague) a évalué la fonction ventriculaire gauche chez des patients atteints de cancer du sein et traités par épirubicine. Elle confirme que la cardiotoxicité est corrélée à la dose cumulée. La détérioration progressive de la fonction cardiaque débute au troisième mois après l'arrêt de la chimiothérapie. A trois ans, une dégradation de 25 % de cette fonction peut être observée chez 60 % des patients, alors qu'à cinq ans la moitié d'entre eux développent une cardiomyopathie sévère. Selon les chercheurs, « ce temps de latence avant l'apparition de la maladie peut être mis à profit pour envisager un traitement préventif ». A cet effet, les résultats d'une étude évaluant, contre placebo, l'efficacité de l'IEC sont attendus. Les premières données sont encourageantes : « La restauration de la fonction cardiaque n'est pas spontanée mais survient au bout de quelques mois. Cependant, nous avons traités plus de 60 patients qui avaient une insuffisance sévère et l'amélioration à long terme est prometteuse », assure le Dr Jensen, qui en est aussi l'investigateur.
Dosage de la troponine
Ce résultat est d'autant plus intéressant que la deuxième étude, conduite par le Dr Daniela Cardinale (université de Milan), montre qu'un diagnostic précoce de l'insuffisance cardiaque est possible. Le marqueur utilisé, dans ce cas, est la troponine I (TnI). « De nombreux travaux ont récemment démontré la valeur de la TnI dans l'évaluation des syndromes coronariens aigus. Nous avons cherché à estimer sa valeur prédictive chez des patients atteints de cancer du sein traités par anthracyclines à fortes doses. » Chez un tiers des 211 patients de l'étude, une augmentation du taux de TnI plasmatique mesurée juste après la cure a été observée, alors que leur TnI de base était normal. Surtout, l'élévation de TnI est fortement corrélée à une détérioration de la fonction ventriculaire évaluée de un à douze mois après la cure. Cette découverte ouvre la possibilité d'une identification des patients à risque qui pourront recevoir un traitement cardioprotecteur.
« Annals of Oncology », 2 mai 2002.
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