« C'EST UTILE puisque c'est beau », affirmait le Petit Prince de Saint-Exupéry. Il semblerait que ce principe ait guidé la signature, le 4 mai 1999, d'une convention nationale entre le ministère de la Culture et de la Communication et le secrétariat d'Etat à la Santé et à l'Action sociale. Il s'agissait de « favoriser le développement culturel dans les hôpitaux ». Des dispositifs financiers furent élaborés pour soutenir les établissements dans l'organisation de jumelages avec des équipements culturels, mais aussi dans la mise en place de bibliothèques ou pour la formation et l'embauche de responsables culturels. Depuis, la convention nationale a été déclinée en une quinzaine de conventions régionales, établies entre les Drac (directions régionales de l'Action culturelle) et les ARH (ou les établissements eux-mêmes) avec le soutien d'un Cercle des partenaires*. Aujourd'hui, les acteurs ne comptent pas en rester là : malgré les difficultés budgétaires des établissements, ils entendent développer et élargir les politiques culturelles hospitalières.
Une méconnaissance des textes.
Selon Xavier Collal, chargé de mission Culture à l'hôpital, « la relation entre l'art et la santé s'inscrit dès les origines » dans l'existence de « lieux où culture et spiritualité coexistaient ». Tout au long de l'histoire des établissements, on constate des interactions entre la création artistique et la fonction hospitalière, dans une « relation fusionnelle, passionnelle, étonnante et complexe ». Ainsi « les hôpitaux furent des espaces d'artistes et de création d'œuvres au Moyen Age » tandis que bien plus tard, à Charenton, « le marquis de Sade mettait en scène des pièces de théâtre où le tout-Paris venait », explique le chargé de mission.
La convention de 1999 ne fait, selon lui, que signer la « re-naissance de la culture à l'hôpital ». Pourtant, explique Eliane Apert, sous-directrice de la qualité et du fonctionnement des établissements de santé, « face au poids de la maladie, face au poids de la souffrance du médecin comme du patient, l'action culturelle peut paraître anecdotique ». La mission est donc « ingrate », mais pas désespérée : les rapprochements permettent à chacun de « s'enrichir du métier de l'autre ».
Une étude commandée par les deux ministères auprès de quelques centaines d'établissements (principalement publics et Psph) montre que « 42 % des chefs d'établissement ne connaissent pas la convention de 1999 ». On imagine alors qu'ils sont encore moins nombreux à connaître la loi du 1er août 2003 relative au mécénat, qui autorise les entreprises à défiscaliser jusqu'à 60 % de leurs dons à des œuvres philanthropiques, une mesure qui devrait faciliter le montage de partenariats culturels. Mais pour Eliane Apert, pas besoin de chercher très loin : la culture à l'hôpital commence par des actions très simples, très modestes, comme « de simples activités de lecture », qui apportent de la qualité de vie aux patients, mais aussi aux familles et aux soignants.
Savoir être utopique.
Pourquoi communiquer maintenant sur la convention de 1999 ? Les deux ministères impliqués espèrent « établir une nouvelle convention qui serait relayée par une circulaire interministérielle », explique Catherine Ahmadi, déléguée adjointe de la délégation au Développement et à l'action territoriale (Ddat) du ministère de la Culture et de la Communication. « Notre objectif est bien de faciliter l'accès de la culture au plus grand nombre, y compris les publics empêchés », ajoute-t-elle.
Pourquoi pas de nouvelles conventions incluant les collectivités territoriales, les fédérations d'établissements, les Ddass et les Drass, voire les établissements médico-pédagogiques et les maisons de retraite, « qui sont, je pense, un enjeu majeur » ? L'idée n'est pas d'imposer un cadrage venu du haut, mais de s'appuyer sur les porteurs de projets, comme cela a été fait pour les 200 jumelages déjà réalisés (projets cinématographiques, bibliothèques, ateliers animés par des artistes, expositions, rencontres avec des écrivains, programmations théâtrales, etc.).
Les établissements sont invités à contacter les Drac pour connaître les possibilités de financement et le métier de responsable culturel. La culture à l'hôpital dépasse largement le cadre d'une animation : il s'agit de créer un bain de culture, un environnement d'échanges entre l'établissement et l'extérieur.
La sollicitation des professionnels peut se nicher jusque dans les détails, comme la mise en place de la signalétique par exemple. Les Drac sont des références en matière de connaissance des possibilités culturelles à la fois en termes de réalisation et de repérage des interlocuteurs. Idéalement, Catherine Ahmadi parle de mise en place, dans un avenir incertain, de « résidences d'artistes ». Et si on lui objecte la réalité du terrain, elle répond sans hésiter que « l'action publique se doit d'être utopique ».
* Il regroupe à sa création le ministère de la Culture et de la Communication, la fondation Air France, la fondation Banques CIC pour le Livre, la fondation Bayer-Santé, la fondation Hachette, la fondation France-Télécom, la fondation Ronald McDonald, la fondation Suez Lyonnaise des Eaux, l'Institut Electricité Santé, le laboratoire Glaxo-Wellcome (aujourd'hui GSK), Lego-France et Sanofi.
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