C’EST PEU DE DIRE QUE LE SONDAGE du « Quotidien » intéresse les principaux leaders médicaux. Devant les résultats, chacun d’eux s’est efforcé, calculette à la main, d’en tirer les leçons. Tout en restant prudents car, bien sûr, ce n’est qu’une photographie, et il reste plusieurs semaines pour convaincre...
Analyse commune : tous rappellent que la campagne commence à peine et parient sur une dynamique favorable. Paradoxe : MG-France, qui fait la course en tête chez les généralistes, adopte un profil bas et s’adresse aux médecins qui n’ont pas l’intention d’aller voter. La Csmf, qui doit convaincre de sa stratégie d’accompagnement des réformes en cours, affiche sa confiance, décidée à conserver la majorité dans les deux collèges «malgré les états d’âme». Tour d’horizon.
• La Csmf joue la force tranquille.
A l’aube d’une campagne «acharnée», le syndicat vainqueur des élections en 2000 affiche sa sérénité.
Le Dr Michel Chassang, président de la confédération, n’est «absolument pas surpris» par son score chez les spécialistes (43 %), qui laisse tous ses concurrents à distance respectable. «C’est clair, un seul syndicat défend l’ensemble des médecins spécialistes, c’est la Csmf», résume-t-il.Objectif : la majorité absolue. L’érosion de la Csmf chez les spécialistes (60 % des voix en 2000)? «La campagne commence, nuance-t-il . J’ai le sentiment que les spécialistes vont mesurer le sérieux de l’action de la Csmf.»
Côté généralistes, le Dr Chassang fait le constat de l’existence de «deux forces, MG-France et la Csmf». «Les choses restent ouvertes», estime-t-il. MG-France fait la course en tête ? Le Dr Chassang veut croire que le syndicat des généralistes ne progressera plus, alors que la «dynamique de campagne» profitera à son organisation qui, affirme-t-il, «conservera in fine une majorité relative dans ce collège». Conscient que les généralistes «ont des états d’âme», le patron de la Csmf va intensifier sa campagne mêlant défense du bilan «dont nous n’avons pas à rougir» (dernier exemple : le C «enfants» à 23 euros pour les 2 à 6 ans à partir du 15 avril) et critiques de son principal adversaire. «Qu’a-t-il fait, sinon le médecin référent?»
Quant à l’émergence d’un front des protestataires, il se montre ironique. «Cette alliance entre les ultralibéraux de la FMF et les ultraétatistes de MG-France me semble cocasse, c’est comme si de Villiers se liait à Arlette Laguiller...»
• MG-France: mobiliser car «chaque voix comptera».Prudence de Sioux ou fausse modestie ? En tête de notre sondage chez les généralistes, MG-France joue la modestie avec une priorité : mobiliser tous ses électeurs potentiels, et notamment les nombreux indécis, les «démobilisés» et ceux qui ont l’intention de ne pas voter (42 % des généralistes). «Chaque bulletin de vote comptera pour choisir son avenir et ses conditions d’exercice, c’est le message que je veux envoyer aux médecins», martèle le Dr Pierre Costes, président du syndicat. S’il constate qu’une majorité de médecins généralistes «contestent ouvertement les modalités de la convention» (le front Csmf/SML totalisant seulement 39 % des voix) , il n’en tire «aucune conséquence» à ce stade. «Il n’est pas question de vendre la peau de l’ours, on va travailler pour convaincre les médecins de l’importance de ce scrutin.»
• Pour le SML, «le jeu reste ouvert».
Avec 19 % des voix des spécialistes et 10 % des voix généralistes, l’outsider SML estime qu’il dispose d’un «socle correct» dans les deux collèges pour lancer sa campagne (le 25 avril officiellement) . Convaincu que les sondages minorent toujours les résultats du SML, en raison d’une implantation hétérogène sur le territoire, le président Cabrera estime que «le jeu reste ouvert». «Un grand nombre de médecins sont perdus. Le SML a pris le pouls de la base, il s’agit maintenant d’expliquer les enjeux du scrutin, au-delà du positionnement «pour ou contre» la convention puisque les médecins y sont!» Plutôt que de «promettre la lune», le SML veut convaincre les libéraux qu’il est possible de «faire évoluer l’exercice, le métier, le système» par un positionnement conventionnel très exigeant (d’où son refus de signer l’avenant 12).
S’il admet qu’ «il y aura un vote contestataire chez les généralistes», il s’interroge sur son avenir. «Admettons que MG-France devienne majoritaire: avec qui fera-t-il une convention? Et sur quel programme alors que ce syndicat avait signé le C à 18,50 euros en pleine grève des gardes?»
• Déçue, la FMF croit à sa «bonne trajectoire».
Le Dr Jean-Claude Régi, président de la FMF, ne cache pas sa déception devant les résultats de notre sondage dans les deux collèges (12 % chez les spécialistes, 7 % chez les généralistes). Même si ces scores traduisent une progression du syndicat par rapport au scrutin de 2000, ils ne reflètent pas, selon le Dr Régi, «les courriers d’encouragement et de soutien que nous recevons, les adhérents payants qui nous rejoignent, les remontées que nous avons du terrain». Une «bonne trajectoire» à laquelle croit toujours le président de la FMF, non signataire de la convention. «Avec les renforts que nous avons eus (notamment les médecins issus des coordinations) , une progression de 2% chez les généralistes, ce serait ridicule! s’emporte le Dr Régi. Et chez les spécialistes, on espère aussi faire beaucoup mieux.» «Notre marge de manoeuvre est importante», conclut-il avant de rappeler : «Il y a les intentions de vote et il y a les résultats.»
• Espace Généraliste se réjouit de sa«percée».
Avec 9 % des voix, Espace Généraliste totaliserait un premier score honorable. «Une percée correcte», résume son président Claude Bronner, qui espère «faire beaucoup mieux» et même damer le pion à tous ses concurrents dans ses quelques bastions. Sur cette dynamique «prometteuse» qui porte ceux qui dénoncent l’ «application administrative» de la réforme, Espace Généraliste veut contribuer à créer une nouvelle donne syndicale chez les généralistes. Quitte à participer après les élections à un grand rassemblement.
Les résultats de 2000
Lors du dernier scrutin aux Urml en 2000, la Csmf avait remporté la victoire dans les deux collèges.
Ainsi chez les généralistes, elle avait obtenu 40,94 % des voix et 252 sièges pour l’ensemble des régions, devançant largement MG-France qui avait seulement recueilli 30,94 % des voix et qui perdait alors son rang de premier syndicat d’omnipraticiens. Le SML arrivait en troisième position avec 15,91 % des voix. Quatrième, le syndicat des médecins indépendants de France (Smif), qui devait devenir plus tard la composante généraliste du syndicat Alliance et qui obtenait 6,99 % des suffrages. Ce syndicat est peu présent dans le scrutin de cette année. Enfin, dernière place pour la FMF qui n’obtenait en 2000 que 5,22 % des suffrages des généralistes.
Chez les spécialistes, la victoire de la Csmf était encore plus probante puisqu’elle dépassait largement la majorité absolue avec 59,36 % des voix et obtenait 357 sièges. Le SML arrivait en deuxième position avec 22 % des voix alors que l’Union collégiale des chirurgiens et spécialistes français (Uccsf) obtenait 7,53 % des voix et la FMF 6,77 %. Le Smif, qui présentait également des candidats dans ce collège, arrivait alors en dernière position avec 4,33 % des voix.
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