Fronde contre la loi de santé

Touraine cherche un compromis, les médecins ne lâchent rien

Publié le 08/12/2014
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Crédit photo : PHANIE

Cessez-le-feu ! Devant la fronde médicale généralisée contre le projet de loi de santé, le gouvernement joue désormais la carte de l’apaisement.

Le cabinet de Marisol Touraine a commencé à recevoir en « bilatérale » les syndicats de médecins libéraux et la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) pour trouver un terrain d’entente. Sans succès pour l’instant, mais plusieurs entretiens sont programmés cette semaine.

Les généralistes de MG France et la CSMF, qui appellent à fermer leur cabinet entre le 23 et 31 décembre, doivent être reçus respectivement mercredi et jeudi. « Les discussions sont en cours, des compromis sont possibles », veut croire le ministère qui a donné quelques gages face à l’ampleur de la contestation.

Il envisage en particulier de revenir sur l’interdiction stricte des dépassements d’honoraires dans les cliniques remplissant une mission de service public hospitalier, gros sujet de conflit. Plusieurs options ont été avancées, permettant aux établissements privés de réaliser des dépassements maîtrisés dans les limites fixées par le contrat d’accès aux soins (CAS) ou autorisant les tarifs libres aux cliniques accueillant un service d’urgences.

Inacceptable pour la FHP

La première piste, garantissant un pourcentage d’activité aux tarifs opposables, a été jugée « inacceptable » par la FHP. « Cela impliquerait que 80 % des praticiens libéraux des cliniques adhèrent au contrat d’accès aux soins (CAS) », affirme son président, Lamine Gharbi, reçu vendredi au ministère. Les cliniques ne veulent pas s’exposer à un bras de fer avec leurs propres praticiens sur la question du secteur II. La FHP continue d’exiger le retrait du projet de loi de santé et appelle à un mouvement illimité de cessation d’activité des cliniques à compter du 5 janvier. Pour le Dr Xavier Gouyou-Beauchamps (Le BLOC), les ouvertures du ministère « ne changent rien ». « Ils font tout pour que le conflit ne fasse pas tache d’huile mais c’est raté », estime-t-il.

Le ministère de la Santé a aussi promis de « corriger » le service territorial de santé au public que les libéraux qualifient de « liberticide et étatique ». Le cabinet de Marisol Touraine réaffirme que cette organisation locale sera portée par les professionnels. Là encore, les ajustements sont jugés trop flous.

Pas de démobilisation

« Le compte n’y est pas, déclare au « Quotidien » le Dr Patrick Bouet, président du Conseil national de l’Ordre des médecins. Il faut réécrire le texte et reporter le passage de la loi devant le Parlement. »

Le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF, demeure déterminé : « L’heure n’est pas du tout à la démobilisation, il n’est question que d’hypothèses de travail. » Selon lui, la colère des médecins dépasse largement la loi de santé et le gouvernement a trop tardé. Cette exaspération est nourrie par le « harcèlement » des caisses, les tarifs gelés de la consultation, les « attaques » sur le volontariat dans la PDS, le « hold-up » sur le budget du DPC...

La prudence est également de mise chez le Dr Roger Rua, président du SML. « La confiance n’existe plus. Le ministère donne un petit machin par-ci ou par-là pour démobiliser le mouvement mais ce que nous voulons, c’est remettre à plat cette loi. »

MG France de son côté ne veut pas « qu’on règle le problème des cliniques et que les généralistes se retrouvent les "cocus" de l’affaire », met en garde son président le Dr Claude Leicher.

La fermeture des cabinets pourrait-elle être annulée ? « Si la grève n’avait pas lieu, ce serait extrêmement mal vu par la base », confie un leader syndical, qui exclut désormais la levée des mots d’ordre.

Christophe Gattuso

Source : Le Quotidien du Médecin: 9372