POUR LA DEUXIÈME FOIS depuis les élections professionnelles de mai 2006, les syndicats représentatifs des médecins libéraux étaient invités par l’Union nationale des caisses d’assurance-maladie (Uncam) à discuter des dossiers de la vie conventionnelle. La première négociation sur le secteur optionnel avait tourné court. La deuxième, qui s’est tenue mercredi au siège de l’Uncam, n’a pas non plus pleinement tenu ses promesses. Frédéric Van Roekeghem, le directeur de l’Uncam, souhaitait aborder deux sujets laissés en suspens depuis plusieurs mois, ce qui lui a valu un rappel à l’ordre du ministre de la Santé. La convergence entre les dispositifs du médecin traitant et du médecin référent et les conditions permettant de lutter contre la pénurie médicale étaient en effet inscrites à l’ordre du jour.
Sans illusion.
A leur arrivée au siège de l’Uncam, les délégations syndicales ne se faisaient guère d’illusions sur l’issue de ce rendez-vous. «On pourrait croire que cette réunion est une ouverture, mais, compte tenu de la lettre que nous a adressée le ministre de la Santé (“le Quotidien” du 30 novembre) , nous savons que c’est une mise en scène pour prétendre que l’on a écouté tout le monde», déclarait le Dr Pierre Costes, président de MG-France, qui s’oppose avec la Fédération des médecins de France (FMF), Espace Généraliste et l’Union collégiale des chirurgiens, médecins et spécialistes français (Uccmsf) à la convention médicale au sein de l’Intersyndicale majoritaire. A grand renfort de courbes et de cartes, l’assurance-maladie a présenté l’évolution de la densité médicale de 1985 à 2005 pour justifier la mise en place de mesures incitatives dans les régions qui manquent de médecins et pour adopter des mesures pénalisantes dans les régions où les praticiens sont trop nombreux. En se fondant sur des projections de la Drees (Direction de la recherche, des études et des statistiques au ministère de la Santé), l’Uncam estime que les effectifs de médecins vont diminuer de 9 % entre 2002 et 2025 (de 205 000 à 186 000 médecins) et que les femmes médecins seront plus nombreuses que les hommes. Partant du constat que, dans le futur, cette diminution va rendre d’autant plus aigus les problèmes de répartition, l’Uncam a présenté aux syndicats une option conventionnelle destinée à favoriser l’installation des généralistes de secteur I dans les zones déficitaires. Cette option permettrait à l’omnipraticien installé dans une zone déficitaire définie par les missions régionales de santé (MRS) de bénéficier d’une aide forfaitaire correspondant à 20 % de son activité. Le praticien s’engagerait en retour à télétransmettre, à participer à la permanence des soins, à suivre des actions de formation professionnelle conventionnelle (FPC) et à exercer au moins trois ans dans la zone. Dans le même temps, l’Uncam envisage de mettre en place des mesures contraignantes à l’installation dans les « zones très surdotées » et de minorer de 20 % la participation au financement des cotisations sociales des généralistes qui s’installeraient dans ces zones.
L’assurance-maladie a également présenté aux médecins les modalités d’un contrat de santé publique pour accroître la qualité et l’efficience des soins qui permettrait «une sortie progressive de l’option référent». Ce contrat, dont l’engagement serait individuel, permettrait d’apporter une «rémunération complémentaire modulée» en échange d’engagements de bonnes pratiques : iatrogénie médicamenteuse chez les personnes âgées, prévention du cancer du sein, risque cardio-vasculaire, délivrance de génériques, respect de l’ordonnancier bizone, respect de prescription de pratiques médicamenteuses. L’assurance-maladie a par ailleurs réaffirmé son souhait de ne pas supprimer le tiers payant mais de «l’orienter vers les patients qui en ont le plus besoin».
Des rencontres bilatérales sont programmées.
A l’issue de cette réunion de trois heures, l’Uncam souhaite rediscuter de ces sujets la semaine prochaine avec tous les syndicats représentatifs lors de réunions bilatérales. «Nous voulons avancer et conclure sur ces deux dossiers très ouverts», assure-t-on à la direction de l’Uncam.
Déçu de la tournure des événements, le Dr Jean-Claude Régi, président de la FMF, déplorait l’organisation de cette «réunion sur commande destinée à gagner du temps». «On fait semblant de discuter, mais les conditions de la confiance sont loin d’être renouvelées», lâchait-il.
Le Dr Costes a annoncé de son côté que l’Intersyndicale allait appeler les médecins généralistes à participer à la journée d’action nationale du 7 décembre lancée par les internes de médecine générale et soutenue par les enseignants de médecine générale pour l’avenir de leur discipline. Le syndicat décidera le 9 décembre des actions qu’il mènera dans les mois à venir.
Le SML a jugé cette réunion «de déblocage» constructive, mais «elle ne va pas assez loin sur le sujet de la démographie». Le président de la Confédération souligne pour sa part qu’il n’est pas prêt «à perdre deux mois avec ces deux dossiers». «Nous ne nous laisserons ni leurrer ni distraire des vrais enjeux pour l’avenir du système conventionnel, assure le Dr Chassang. Nous devons construire, c’est-à-dire faire le bilan de la maîtrise médicalisée pour 2006 et négocier l’affectation des marges de manoeuvre obtenues dans le cadre du Plfss [projet de loi de financement de la Sécurité sociale] 2007 pour les prochaines revalorisations.» A l’assurance-maladie, on est beaucoup plus tempéré. «Nous ferons le bilan de l’année 2006 dans le courant de décembre, assure un dirigeant. Il nous faut un peu plus de recul pour voir quelles sont nos marges de manoeuvre.»
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