Le rôle protecteur contre le risque cardio-vasculaire du traitement estrogénique substitutif chez les femmes ménopausées a été remis en cause par un certain nombre d'études cliniques, dont l'étude HERS (Heart and Estrogen/Progestin Replacement Study, 1998). En effet, la survenue d'événements cliniques chez des patientes atteintes d'une maladie coronarienne antérieure au traitement substitutif, en dépit d'une balance de lipoprotéines favorable (HDL augmenté et LDL diminué), a conduit les experts à ne pas recommander la substitution dans cette population de femmes ménopausées.
Dans leur étude publiée dans le « New England Journal of medicine », David M. Herrington et coll., présentent une approche pharmacogénétique qui a le mérite de rendre compte de la variabilité de la réponse HDL à l'hormonothérapie. Cette réponse serait liée à un polymorphisme du gène codant pour les récepteurs alpha aux estrogènes (ER-alpha) et situé sur le chromosome 6 (6q24).
Selon les auteurs, « la caractérisation des variants alléliques, qui modifient l'expression et la fonction du gène, pourrait aider à mieux comprendre le mode d'action et de régulation des estrogènes et aussi à estimer les bénéfices ou les risques éventuels de la substitution hormonale ». Les polymorphismes de ce gène sont connus, mais aucune association significative n'a été mise en évidence dans les pathologies où ils ont été étudiés. Cette fois, les auteurs ont corrélé le polymorphisme, non plus à un phénotype donné - le taux de HDL - mais à modification liée à un facteur environnemental - le traitement substitutif.
Ainsi, ils ont examiné l'amplitude de l'élévation des HDL en fonction de 10 variants, chez 309 femmes ménopausées atteintes de maladie coronarienne. Ces femmes ont reçu soit l'estrogène seul (0,625 mg/j), soit l'estrogène et la progestérone (2,5 mg/j), soit un placebo. Pendant une période de 3,2 ans en moyenne, des angiographies régulières ont permis de suivre l'évolution de la maladie coronarienne. Un bilan lipidique a été effectué à l'entrée de l'essai et tous les ans : HDL, LDL, apolipoprotéine A1 et B. Toutes les patientes ont eu un génotypage par la méthode PCR (Polymerase Chain Reaction). Celle-ci a été complétée par l'amplification de certaines régions dans les 96 cas où la réponse HDL à la substitution hormonale était très élevée ou très diminuée (régions promotrice, 5' et 3' de la première séquence IVS1).
Les HDL3 augmentés
Après ajustement selon l'âge, l'ethnie, le statut glycémique, l'indice de masse corporelle, la consommation de tabac ou d'alcool et l'exercice physique, les auteurs ont mis en évidence un polymorphisme particulier impliqué dans les fortes réponses. Chez les femmes homozygotes pour ISV1-401 C/C (une cystine au niveau de l'intron 1 non codant en position 401 précédant l'exon codant 2), l'élévation des HDL après traitement est deux fois plus importante que chez les autres femmes (13,1 mg/dl contre 6 mg/dl). Cet effet porte essentiellement sur la fraction HDL3 qui est le plus souvent associée aux événements coronariens et à l'athérosclérose. Le résultat a été le même quel que soit le type de traitement (estrogène seul ou associée à de la progestérone) et quelle que soit l'origine ethnique. Il était d'autant plus significatif que la compliance au traitement était bonne.
Le mécanisme de cet effet n'est pas encore élucidé. De même, la relation avec une diminution du risque de maladie cardio-vasculaire reste à démontrer. Des études devront confirmer ce résultat qui reste prometteur dans la perspective d'une individualisation du traitement substitutif pour chaque patiente.
« New England Journal of Medicine », vol. 346, n° 13, 28 mars 2002, pp. 967-972.
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