Entretien

Thierry Schifano (FNTS) : « Le transport sanitaire paie le prix d’une organisation en silos »

Publié le 13/11/2014
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Crédit photo : DR

LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN : Quelle est la situation financière actuelle du transport sanitaire ?

THIERRY SCHIFANO : Le secteur est en grande difficulté. Alors que le volume de la dépense de transport sanitaire continue de croître, entre 2 et 5 % par an à cause du vieillissement de la population, des entreprises structurées décrochent. Leur risque de défaillance a presque doublé depuis 2011. Plus de 20 % de la profession affiche des résultats négatifs, tandis que les autres entreprises, qui réalisent entre 0,8 % et 1 % de marge, peinent à renouveler leur flotte de véhicules. Le transport sanitaire paie le prix d’une organisation du secteur en silos, non transversale.

La Cour des comptes mise sur 440 millions d’économies, notamment en adaptant les véhicules aux besoins des patients. Quelles sont vos propositions ?

La Cour des comptes, loin du terrain, diffuse des clichés ! Comment peut-on mieux adapter les véhicules aux besoins lorsque, sur 65 millions de trajets, seulement 15 millions sont réalisés en ambulance ? Quand on regarde la dépense, ces 15 millions de transports en position couchée coûtent 1,3 milliard d’euros. Les 50 autres millions de trajets assis sont partagés entre les taxis (pour 1,1 milliard d’euros) et les véhicules sanitaires légers (pour 800 millions d’euros), deux moyens qu’il faudrait enfin harmoniser.

Nous avons beaucoup travaillé sur la réorganisation du secteur. D’après nos retours d’expérience, le covoiturage permet de réaliser 600 millions d’euros d’économie en transport assis, tout en améliorant la marge de nos entreprises.

Plus largement, notre plan stratégique 2012-2015 dessine d’autres voies d’optimisation ces dépenses. En matière de régulation des flux hospitaliers, la messagerie sécurisée entre les acteurs pourrait être très utile. Les consultations devraient être mieux coordonnées et l’urgence préhospitalière, revue. Un décret que nous attendons désespérément devrait permettre la fongibilité des enveloppes ville et hôpital.

Enfin, le secteur cherche à innover avec « l’ambulance 2.0 », qui englobe des véhicules à faible émission de carbone ou fonctionnant grâce aux nouvelles énergies, la dématérialisation des factures ou encore l’éco-conduite.

Qu’attendez-vous de cette 17e université ?

Seuls, les transporteurs sanitaires ne pourront mettre en place ce nouveau modèle économique, pourtant très attendu. Ça commence à bouger dans tous les départements, mais il faut accélérer le mouvement.

Au 1er janvier 2015, les VSL bénéficieront d’une nouvelle grille tarifaire qui répercute l’augmentation de 4,5 points de la TVA ; mais ce n’est qu’une régularisation, non une revalorisation.

Il faut que chaque partenaire (les établissements via les fédérations FHF, FHP, FEHAP, SYNERPA, l’assurance-maladie, la direction générale de l’offre de soins, le Conseil économique, social et environnemental) partage sa vision de la santé et casse cette organisation en silos.

Le ministère de la santé a reconnu la pertinence de notre plan stratégique : il doit nous aider à le développer. Les établissements et les prescripteurs doivent se l’approprier, et l’assurance-maladie doit établir des accords de bonne pratique.

Propos recueillis par Coline Garré
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Source : Le Quotidien du Médecin: 9365