Le déficit immunitaire combiné sévère est une maladie rare des « bébés-bulle » qui sert de modèle, car c'est la première maladie pour laquelle la thérapie génique a démontré son efficacité. C'est en 1999 que l'équipe française d'Alain Fischer et Marina Cavazzano-Calvo, hôpital Necker - Enfants-Malades (Paris) obtient un succès chez cinq enfants souffrant d'un déficit immunitaire lié à l'X (le SCID-X étant caractérisé par un défaut d'une chaîne gamma-c impliquée dans la formation de cinq récepteurs à des cytokines nécessaires au développement des cellules T et NK) et traités par thérapie génique (ces enfants n'ayant pas de donneur de moelle osseuse HLA compatible).
Des résultats positifs qui perdurent
Ce succès rapporté dans « Science » (avril 2000) est suivi deux ans plus tard par une publication dans le « New England Journal of Medecine » (avril 2002) faisant état de la persistance de ce résultat encourageant puisque quatre des cinq enfants traités entre mars 1999 et février 2000, ont vu disparaître les signes cliniques du déficit immunitaire (tels que les infections pulmonaires et les lésions cutanées caractéristiques du SCID-X) et surtout ont pu retourner à leur domicile. Ces enfants mènent une vie normale et, à ce jour, neuf ont bénéficié de ce traitement. Parallèlement, des résultats positifs ont été rapportés par une équipe britannique chez quatre autres enfants.
L'essai suspendu en raison d'une sérieuse complication
Un effet indésirable grave à type de prolifération monoclonale non contrôlée de lymphocytes T matures est survenu chez un jeune patient en octobre 2002, entraînant des signes cliniques. Ce qui a amené l'équipe du Pr. A. Fischer (en accord avec l'AFSSAPS) à suspendre les essais de thérapie génique dans le SCID-X. Un deuxième enfant a été atteint par la même complication en janvier 2003. Après traitement, ces enfants vont bien aujourd'hui.
L'origine de cette complication est liée à un processus de « mutagenèse insertionnelle » qui peut survenir dès lors qu'un ADN extérieur s'insère dans le génome. Ce risque aléatoire n'a encore jamais été observé dans un essai clinique, rappelle le Pr. A. Fischer, qui a récemment publié l'analyse de cette complication dans « Science » (17 octobre 2003). Selon les spécialistes, c'est ce processus de « mutagenèse insertionnelle » associé à l'insertion du rétrovirus utilisé au cours de la thérapie génique qui aurait entraîné la dérégulation d'un gène cellulaire. Par ailleurs, ils émettent l'hypothèse selon laquelle cette complication pourrait être favorisée par un certain nombre de facteurs de risque liés au protocole, à la maladie elle-même, avec la restauration de la capacité proliférative des cellules T ayant augmenté les possibilités de remaniements aberrants, ainsi qu'au très jeune âge des enfants.
La reprise de l'essai est envisagée
Dans l'état actuel des connaissances, la reprise de cet essai de thérapie génique semble pouvoir être envisagée dans un délai de l'ordre d'un an après avoir terminé l'évaluation des facteurs de risque et dans des conditions permettant d'assurer la même efficacité tout en améliorant la sécurité. Le Pr A. Fischer évoque aussi, avec toute la prudence requise, la possibilité d'étendre l'utilisation de la thérapie génique à d'autres formes de déficit immunitaire combiné sévère.
D'après un entretien avec le Pr. Alain Fischer, unité d'immunologie et d'hématologie pédiatriques, hôpital Necker - Enfants-Malades, Paris
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