Dans « le Quotidien » du 16 septembre dernier, le président du LEEM (Les entreprises du médicament, ex-SNIP) Jean-Pierre Cassan expliquait que la mise en place du tarif forfaitaire de responsabilité (TFR) devrait avoir pour corollaire l'abandon de l'obligation pour le médecin de prescrire en DC (dénomination commune), et pour le pharmacien, le respect à la lettre de la prescription du praticien, autant dire la fin du droit de substitution. Il précisait même : « Pour les 71 groupes concernés par le TFR, je ne vois pas pourquoi le pharmacien substituerait un médicament à un autre, surtout si les prix ne sont pas différents. »
Cette prise de position a fait bondir les syndicats de pharmaciens. Pour Bernard Capdeville, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), « dans ses déclarations, Jean-Pierre Cassan reconnaît en creux que le pharmacien est le principal acteur du développement du générique, et je l'en remercie ». Mais il redoute que ce principal acteur devienne la principale cible du LEEM : « Pour notre part, nous sommes résolument hostiles au fait de limiter le droit de substitution aux médicaments sans TFR ; depuis que leur a été accordé ce droit de substitution, les pharmaciens ont fait leur travail dans un climat d'hostilité générale, aussi bien de la part de certains médecins généralistes que de la part des laboratoires pharmaceutiques. Si on revient en arrière sur le droit de substitution, les Français vont comprendre que les génériques n'ont pas d'intérêt pour eux ; avec beaucoup de patients, il a fallu être très pédagogue pour les convaincre de passer aux génériques, et une fois décrochés de ces génériques, ça n'est pas demain la veille qu'on les y fera revenir. »
Bernard Capdeville ajoute que « de plus, la guerre du générique n'est pas terminée : que se passera-t-il dans les prochains mois si les génériqueurs baissent leurs prix à leur tour, pour rester moins chers que les princeps ? ».
Une partie de poker-menteur
Quant à la prescription en DC, Bernard Capdeville l'estime indispensable : « La DC est née le 5 juin 2002 (date de l'accord qui portait le C à 20 euros en échange de l'engagement des généralistes à réaliser 25 % de leurs prescriptions en DC), et les pharmaciens n'ont pas été associés à sa mise en place, ils l'ont seulement entérinée. Dans le cadre d'une politique de croissance des génériques, la prescription en DC permet d'éviter la confusion, c'est une politique de clarté, de sécurité et de santé publique. Moins on est confus, mieux ça vaut. » Bernard Capdeville redoute cependant que Jean-Pierre Cassan ne soit écouté par le ministère de la Santé : « La question est de savoir si les autorités vont se laisser attendrir par le discours des industriels du médicament. Je n'ai pas de réponse pour le moment, mais j'ai cru percevoir une inquiétude venant de l'assurance-maladie ; il y a un certain nombre d'experts en santé publique qui pensent que pousser le bouchon trop loin sur le TFR risque de coûter cher à l'Etat. »
Sur l'issue du dossier, Bernard Capdeville n'a évidemment aucune certitude et doit se contenter d'hypothèses, de craintes ou de pronostics, et interrogé sur le sujet, il préfère répondre de manière elliptique : « Entre l'Etat, l'assurance-maladie et les industriels du médicament, la partie de poker-menteur continue. »
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