CINEMA
DE NOTRE ENVOYEE SPECIALE RENEE CARTON
L E roman de Jean Giono, dont l'uvre a été souvent adaptée au cinéma (dernier film en date, « le Hussard sur le toit », de Jean-Paul Rappeneau), a provoqué bien des désirs. Celui d'Alexandre Astruc, qui tient Giono « pour le plus grand romancier contemporain que nous ayons », et a co-signé le scénario, envisageant un temps de le tourner lui-même. Celui de Laetitia Casta, qui a voulu ce rôle dur et énigmatique de Thérèse. Et si finalement, c'est le franco-chilien Raoul Ruiz qui a été chargé de le réaliser, il y a trouvé matière à développer ses propres interrogations.
On est loin ici de la Provence de Pagnol (ou du moins des « pagnolades »). Terres sombres et magnifiques filmées en cinémascope, sous la pluie, la neige ou le soleil brûlant. Terres de misère, à la fin du siècle dernier, où les passions et les affrontements ne peuvent être que violents. « Les gens d'ici sont graves, secrets, très timides, dit Giono . Secrets surtout ; pour tout dire : fermés, capables de silences qui durent vingt ans ».
Si l'on découvre, racontée au soir de sa vie lors d'une veillée d'enterrement, l'histoire de Thérèse, on ne découvrira pas vraiment ses émotions profondes. Pas plus qu'on ne comprendra totalement la trouble relation qui la lie à l'élégante Madame Numance, la femme généreuse et sans enfant qui la prend sous sa protection, au risque de s'y perdre. C'est le plus passionnant du film, son centre d'ailleurs : « ...Ce qui meut ces deux femmes, dont les destins finissent par se rejoindre dans la folie, c'est cette quête du mystérieux qui les dépasse et qui n'a pas de nom dans le vocabulaire courant », explique Astruc .
Le mystère, c'est ce que Raoul Ruiz sait laisser subsister quand les péripéties d'une vie, avec des naissances, des morts, des actes sans retour, auront été racontées. Et le mystère, c'est ce qui permet à Laetitia Casta de jouer avec sobriété, sans avoir à exprimer des nuances subtiles d'émotions (qui dit d'ailleurs qu'elle n'en serait pas capable ?).
C'est aussi le miracle de la belle et troublante histoire de Giono et de la mise en scène ample et simple de Ruiz : faire fonctionner ensemble des comédiens aussi différents que Casta, Arielle Dombasle (toute en subtilité et en retenue), John Malkovich (très touchant), Frédéric Diefenthal (non, il n'y a pas que « Taxi » dans sa vie professionnelle, ce n'est pas la première fois qu'il le démontre), Charles Berling (dans un rôle de méchant usurier) ou Johan Leysen.
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