DANS LES FILMS américains (les mauvais, il y en a beaucoup), les héros passent leur temps à exprimer et à expliquer leurs sentiments et leurs émotions, et c’est lassant. Dans les films de Bruno Dumont, l’ex-prof de philo, les personnages peinent à aligner deux phrases de suite, et c’est frustrant. Il faudra en particulier toute la durée de « Flandres » et l’expérience de l’enfer de la guerre pour qu’André parvienne à articuler deux mots, «Je t’aime». C’est bien sûr volontaire. «Quand je filme un visage, je veux que le spectateur ressente ce que le personnage sent, explique le réalisateur. Rien ne passe par la parole (…). A l’écran, cela devient une sorte d’alchimie entre le spectateur et le héros. Le spectateur est directement connecté à son cerveau et à ses émotions brutes.Cela marchait sans doute pour « la Vie de Jésus » et « l’Humanité ». Mais ici, cela ne fonctionne pas. Quand Dumont filme ses jeunes personnages dans les champs de ses Flandres natales, les paysages s’accordent, comme il le souhaite, à leur climat intérieur. Quand il envoie les garçons dans une guerre lointaine (filmée en Tunisie, et cela se voit) et qu’il les fait passer par les épisodes cinématographiques habituels (la confrontation avec les enfants, le viol, l’hélicoptère, la torture, les camarades tués, la lâcheté...), on n’y croit pas, on le regarde se dépatouiller tant bien que mal avec sa mise en scène.
Les comédiens, non professionnels, comme d’habitude chez Dumont, font consciencieusement leur part d’un travail difficile. Avec des dialogues, on l’a dit, réduits à leur plus simple expression. Et, pour l’étonnante Adélaïde Leroux, le passage obligé par l’hôpital psychiatrique de Bailleul. Très ambitieux sur le papier (voire prétentieux ?), « Flandres » échoue là où les deux premiers films de Dumont touchaient. C’est peut-être le cerveau du spectateur qui est en cause.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature