La loi de 2004 n’a décidément pas porté chance à la e-santé. Cinq ans plus tard, le DMP va finalement faire l’objet d’un plan de relance (en encadré), tandis que les articles 32 et 33 de la loi, qui installaient la télémédecine dans le système de soins, seront abrogés.
A l’occasion de la discussion de la loi Bachelot, les députés ont en effet adopté, en fin de semaine dernière, un amendement décrivant la télémédecine, comme « une forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication ». La télémédecine fera donc son entrée dans le code de la santé publique et surtout, pour les acteurs qui ont œuvré ces derniers mois à l’intégration du texte dans la loi, elle aura une assise juridique plus solide pour lever les obstacles qui s’opposent encore à son développement.
Au premier rang de ces acteurs : le Dr Pierre Simon, néphrologue, pionnier de la télé consultation au centre hospitalier de Saint-Brieuc, et maintenant conseiller général des établissements de santé auprès du ministère. Chargé, avec Dominique Acker, d’une Mission Télémédecine par la Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins, il a remis en janvier un rapport dense (160 pages) et 10 préconisations. Il a explicitement mené ce travail dans la perspective de la nouvelle loi, soulignant que « la télémédecine peut être un bras de levier puissant pour conduire la restructuration de l’organisation des soins voulue par le législateur dans la loi HPST ».
Le Conseil national de l’Ordre des médecins s’est, de son côté, fortement mobilisé, avec l’objectif de promouvoir la notion de contractualisation comme fondement des activités de télémédecine. « Protocoles techniques et conventions de coopération entre professionnels et établissements devront permettre d’établir et décrire les conditions de mise en œuvre des pratiques de télémédecine », souligne le Livre blanc de l’Ordre, paru également en janvier sous la direction de Jacques Lucas, vice-président. Il redoute en effet une télémédecine « administrée » qui « risquerait d’être très rapidement inadaptée ». Une mise en garde que le CNOM tenait à argumenter avant la discussion de l’amendement et sachant que la définition des actes de télémédecine, de même que leurs conditions de mise en œuvre et de prise en charge financière devront être fixées par décret.
Les industriels ont, dans la foulée, fait écho à ces recommandations du CNOM, tout en rappelant que « les technologies doivent être considérées, non comme un poste de coût mais avec une dynamique d’investissements inscrits dans une logique de retour. » Il est vrai qu’en période de crise, un secteur promis à une croissance annuelle de 19 %, comme l’a chiffré la Commission européenne, mérite la plus grande attention.
L’enjeu se situe pourtant bien du côté des professionnels de santé, analyse Pierre Simon, car « on ne s’est pas suffisamment intéressé à eux alors que l’on observait, en revanche, une forte présence des industriels sur ces sujets jusqu’alors ». D’où l’intérêt de la création de l’ANTEL (Association Nationale de Télémédecine), société savante de télémédecine, qui a vocation à s’ouvrir aux sociétés savantes de disciplines, et se donne pour objectif de « faire connaître les possibilités de la télémédecine, éventuellement de former les médecins et les aider à mettre en place une infrastructure », explique son président, le Dr Jacques Chanliau. « Les neurologues se sont déjà joints à nous pour notre premier colloque, en raison notamment des possibilités offertes par la télé expertise dans la prise en charge rapide des AVC, note le néphrologue. Mais la cardiologie, la diabétologie et, en règle générale, toutes les spécialités traitant des malades chroniques sont concernées ». Sans oublier les généralistes, comme en témoigne ce précurseur du suivi à distance des patients traités en dialyse péritonéale à domicile, qui a amené les premiers généralistes à s’impliquer dans le cadre du système Diatelic.
Les gériatres comptent aujourd’hui parmi les professionnels qui expriment le plus d’attentes vis-à-vis de la télémédecine.
A l’instar du Dr Dominique Léoni, médecin coordonnateur à l’EHPAD PSA Grenelle, à Paris, pour qui la télé consultation se révèle particulièrement utile pour faciliter le dialogue avec des spécialistes parfois difficilement accessibles, à l’instar des orthopédistes. Son établissement fait en effet partie de la dizaine d’établissements et maisons de retraite engagés, en Ile-de-France et en Franche-Comté, dans le réseau Télégéria, organisé autour du Pôle Urgences-Réseaux-Télémédecine de l’HEGP. Les avantages sont indéniables à ses yeux : gain de temps pour les professionnels de santé de part et d’autre, et bien sûr, « en évitant de déplacer une personne âgée, on ne lui fait pas courir le risque de revenir avec une pneumopathie ! ».
Insc. : www.lemedec.com
Une journée télémédecine, avec retours d’expérience, le 28 mai, à Paris. Congrès HIT. Rens. et insc. : www.health-it.fr
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