De notre correspondante
Les pratiques de l'aide à l'arrêt du tabac viennent de faire l'objet d'une vaste enquête* conduite par le CRAES/CRIPS auprès d'un échantillon de 1 460 généralistes rhônalpins, soit près du quart des omnipraticiens exerçant dans cette région.
Conduite en partenariat avec l'Union professionnelle des médecins libéraux (URML) Rhône-Alpes, cette enquête constitue l'amorce, en quelque sorte, d'un projet général visant l'observation et le renforcement des pratiques de prévention et de sevrage du tabagisme par les médecins libéraux. Or les résultats obtenus indiquent que, en la matière, les partenaires de ce projet ont du grain à moudre. En effet, sur les 238 médecins ayant répondu au questionnaire, moins de 43 % considèrent qu'ils ont un rôle primordial à jouer dans l'aide à l'arrêt du tabac. Certes, ils sont également 52 % à considérer ce rôle comme « assez important », bien que l'imprécision de cette syntaxe ne permette pas de conclure que les généralistes enquêtés se sentent particulièrement « concernés par la problématique du tabagisme », comme l'affirment pourtant les auteurs. D'ailleurs, leur satisfaction d'avoir obtenu un taux de participation de 16,8 % pour cette enquête laisse certains spécialistes perplexes.
Décalage
Ainsi, le Dr Raoul Harf, chargé de coordonner la lutte contre le tabac sur l'ensemble du CHU lyonnais, fait observer que, « sur un sujet comme le tabagisme, qui mobilise autant l'opinion publique, ce taux est plutôt faible et témoigne d'un certain décalage entre l'importance du problème et l'intérêt que les médecins lui porte ». L'enquête apparaît donc biaisée par le simple fait que les répondants sont ceux qui se sentent le plus concernés par le sevrage tabagique. De plus, ils ne semblent pas représentatifs de la population des généralistes puisque « les femmes, les non-fumeurs, les médecins en secteur II et les exercices particuliers sont sur-représentés par rapport à la population générale », remarque le Dr Harf. Au regard de ces éléments d'appréciation, il est intéressant de relever que seulement 68 % des enquêtés conseillent « souvent » l'arrêt du tabac à leurs patients fumeurs, alors que le « conseil minimal » voudrait que cet arrêt soit non pas souvent, mais systématiquement proposé.
Prétextes fallacieux ?
Parmi les obstacles rencontrés pour pratiquer l'arrêt du tabagisme, 51 % des médecins de l'enquête évoquent un manque de temps et 76 % mettent en exergue le manque de motivation du patient. « La question de la motivation revient sans cesse, analyse le Dr Harf ; or aucun médecin n'oserait pourtant demander à ses patients diabétiques ou hypertendus s'ils sont assez motivés pour les prendre en charge ! » Finalement, les auteurs de cette étude rebondissent sur le fait que 55 % des enquêtés estiment n'avoir aucune formation sur l'accompagnement à l'arrêt du tabac et que 69 % ne déclarent aucun engagement lié à la prévention ou à l'arrêt du tabac, pour proposer l'élaboration d'un outil d'information sur la prise en charge des addictions, à leur intention. Le CRAES/CRIPS prévoit déjà une réunion (2) avant la fin de l'année, invitant tous les généralistes désireux « d'approfondir la réflexion » sur leurs pratiques à y participer.
(1) A l'initiative du collège Rhône-Alpes d'éducation pour la santé/centre régional d'information et de prévention du sida, et financée par la CRAM et l'URCAM.
(2) 20 novembre ou 1er décembre. Tél. : 04.72.00.55.70.
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