Le tabagisme passif étant de plus en plus considéré comme ayant des effets néfastes sur la santé, on cherche des méthodes fiables et facilement utilisables pour l'évaluer, en tout cas des méthodes plus sûres que les simples questionnaires.
Le dosage de la cotinine urinaire est la méthode la plus largement utilisée. Toutefois, elle se heurte à deux inconvénients : d'une part, à exposition égale, il existe une variabilité interindividuelle de l'excrétion urinaire de la cotinine ; d'autre part, la demi-vie de la cotinine est courte, de l'ordre de vingt heures.
On a aussi pensé à doser la cotinine dans la salive ; mais, d'une part, il existe les mêmes réserves que pour les urines et, d'autre part, il existe un risque de surestimation lié au fait que les glandes salivaires concentrent la cotinine. Plusieurs études ayant montré des erreurs significatives de classification avec le test salivaire, c'est le test urinaire qui a actuellement la préférence.
Un centimètre de cheveu : un mois d'exposition
La méthode la plus récente est la mesure de la nicotine dans les cheveux, qui, du fait de la lenteur de la croissance des cheveux, est peu affectée par la variation quotidienne de l'exposition au tabagisme passif. Cette technique permet de reconstituer une histoire sur le long terme, chaque centimètre de cheveu correspondant à environ un mois d'exposition. Cela dit, il faut tenir compte de deux phénomènes : en premier lieu, la vitesse de croissance des cheveux n'est pas la même chez tout le monde ; par ailleurs, certains produits chimiques, notamment les décolorants, modifient les taux de nicotine dans les cheveux.
Il était intéressant, comme l'ont fait les Américains Am-Delaimy et coll., de comparer la méthode « cheveux » et la méthode « urines », cela dans le cadre d'un questionnaire sur le niveau exposition (même si les questionnaires ne sont pas des étalons or, ils sont valides et ont été utilisés pour décrire la plupart des associations entre tabagisme passif et maladies).
Ce nouveau travail provient d'une étude qui a porté sur le tabagisme passif chez 351 enfants de 3 à 27 mois, hospitalisés pour maladie respiratoire aiguë.
Les parents étaient soumis à un questionnaire de 5 à 10 minutes sur le tabagisme à la maison et sur le nombre de cigarettes fumées (cinq catégories : de 1 à 5, de 6 à 10, de 11 à 15, de 16 à 20, plus de 20). Les cigarettes fumées par chacun des membres du foyer étaient réparties entre celles fumées à la maison et celles fumées ailleurs. Sur les 351 enfants de l'étude, on a pu en étudier 322 : 297 avec un échantillon de cheveu et 158 avec un échantillon d'urines. Le taux de nicotine dans les cheveux variait de 0,19 à 47,82 ng de nicotine par mg de cheveu.
Les principales variables pour l'étude du tabagisme étaient : exposition à la maison (pas d'exposition, tabagisme seulement à l'extérieur, tabagisme dans la maison), nombre de fumeurs parmi les personnes du foyer et parmi les « visiteurs », nombre de cigarettes fumées par les parents, par les autres personnes du foyer, par les visiteurs.
Résultat : en fonction de ces habitudes tabagiques, le taux de nicotine dans les cheveux était un meilleur indicateur que le taux de cotinine urinaire.
La nicotine dans les vêtements, les meubles, l'air expiré
Il semble que le fait de ne fumer qu'à l'extérieur ne protège pas totalement les enfants : dans la présente étude, les enfants dont les parents déclaraient ne fumer qu'à l'extérieur avaient des taux de nicotine intermédiaires entre ceux dont les parents ne fument pas et ceux dont les parents fument à la maison. Les auteurs évoquent la responsabilité de la nicotine qui imprègne les vêtements, les meubles et les murs, ou qui est présente dans l'air expiré par les fumeurs (l'hypothèse d'un tabagisme à la maison en l'absence de l'enfant n'est pas discutée par les auteurs). L'équipe d'Arfi a montré que douze heures après que l'on ait fumé dans une pièce, on y détecte encore de la nicotine.
« J Epidemiol Community Health », 20021 ; 56 : 66-71.
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