Pour la énième fois, la prévention du tabagisme sous forme de campagne médiatique se traduit par une « libanisation » des démarches, que d'autres qualifieront, animés par un même esprit, de « balkanisation ». Hier, c'était le Comité national contre les maladies respiratoires (CNMR) qui annonçait la mobilisation générale, du 12 au 25 novembre prochain, et jusqu'en juin dans les établissements scolaires, pour dire aux 12-15 ans : « Te laisse pas rouler par la cigarette, les cigarettiers veulent t'aliéner en te prenant ton argent et ta santé » (« le Quotidien » du 27 septembre). Aujourd'hui, c'est au tour de la CNAMTS, du CFES et de la Ligue nationale contre le cancer (1) de convier la presse pour faire savoir qu'ils préparent une même opération, pour la fin du mois, sur un thème similaire, « Tabagisme et manipulation », et, là encore, à destination des jeunes.
Cette campagne, de portée nationale, dont les modalités sont pour l'heure gardées secrètes, utilisera les « médias jeunes ». Il s'agit, entre autres, de faire comprendre, dans « un langage branché », à n'en pas douter, qu'une cigarette contient plus de 4 000 substances chimiques toxiques, cancérogènes ou mutagènes. Et, à l'instar du CNMR, on parlera de « liberté », en dénonçant les manipulations rhétoriques des fabricants : « Le communisme est absence de choix, voilà pourquoi, il s'est soldé par un échec ; fumer, par contre, c'est la liberté de choix, voilà pourquoi le tabac survit », pouvait-on lire dans un numéro de 1998 du mensuel « Tobacco International ».
A quand une campagne d'affichage contre le tabagisme, commune à toutes les « boutiques » de prévention et d'éducation pour la santé, rappelant que les pouvoirs publics continuent de profiter très largement, sans vergogne, des taxes qu'ils prélèvent sur le tabac ? D'année en année, ce produit qualifié de « mortel », avec 68 000 décès tous les 12 mois (2), par les autorités sanitaires, rapporte de plus en plus gros à l'Etat : 64,41 milliards de francs en 2000, sans que cela soit une manne pour les préventologues ! Certes, à ce jour, la prévention primaire en direction des adolescents est difficile. Elle est présente dans l'enseignement dispensé dans les classes de 5e, mais la moitié des effectifs n'en bénéficie pas, tandis que les enseignants concernés n'y sont pas préparés dans le cadre leur formation initiale.
A 16 ans, 41 % des Français sont dépendants de la nicotine : deux filles et deux garçons sur cinq de cet âge grillent de 8 à 10 cigarettes par jour. Or seulement 3 % des élèves entrant dans le secondaire sont des fumeurs... pourcentage qui atteint 45 % après le baccalauréat !
(1) Tél. 01.53.55.24.00
(2) Chiffre emprunté à l'Académie des sciences, rapport du 25 novembre 1999 sur la « Pollution atmosphérique due aux transports et santé publique », dans lequel les victimes annuelles de l'alcool sont évaluées à 40 000, celles de la voiture à 8 000 et de la pollution à 1 500.
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