Les buralistes manifesteront le 24 novembre à Paris. Certains, comme le président de la confédération des débitants de tabac, René Le Pape, sont prêts à « entrer dans l'illégalité s'il le faut ». Traduire : si la hausse « criminelle » des prix prévue pour janvier, + 20 %, est maintenue.
Le gouvernement a pourtant tout fait pour calmer leur colère. Jean-Pierre Raffarin a promis un gel de quatre ans de la fiscalité sur le tabac, après la hausse de janvier, et Nicolas Sarkozy a annoncé 12 mesures pour protéger les professionnels des agressions et lutter contre la contrebande. Mais la hausse des prix du 20 octobre, de près de 20 % également, a déjà produit « un effet catastrophique » chez les débitants, et ceux-ci ne sont pas près de cesser le combat, menaçant de ne pas appliquer les taxes ou de s'approvisionner au Luxembourg.
Difficile manœuvre pour le gouvernement, déjà accusé de « reculade » par l'Alliance contre le tabac, qui réunit 28 associations sous la présidence du Pr Gérard Dubois. Pour l'Alliance, le 14 novembre, date de l'annonce du gel de la fiscalité, est « un jour noir pour la santé publique » puisque « l'abandon d'une mesure majeure déstructure toute l'action », celle contre le cancer, priorité du président de la République.
Ce n'était pas le moment de reculer devant des buralistes qui présentent « des arguments fallacieux sous une forme néo-poujadiste » alors que les hausses de prix ont entraîné en un an (du premier semestre 2002 au premier semestre 2003) une baisse des ventes de 8 % et que la chute de la consommation signifierait, si elle se maintenait, « des milliers de vie sauvées ».
Les arrêts en hausse
Les arrêts du tabagisme sont de plus en plus nombreux, confirme l'INPES (Institut national de prévention et d'éducation pour la santé) au vu des résultats d'une étude demandée à l'institut BVA. Plus de 16 % des ex-fumeurs déclarent avoir arrêté lors des douze derniers mois, contre 9,2 % en 1999 (Baromètre santé INPES). Les 15-75 ans sont 30,2 % à fumer contre 34,5 [228] en 1999, une diminution plus marquée chez les femmes (24,5 % de fumeuses contre 30,8 % il y a quatre ans). Et aujourd'hui, trois fumeurs sur quatre (73,8 %) ont envie d'arrêter, ils n'étaient que 58,7 % en 1999. Mieux encore : 37,6 % de ceux qui ont envie d'arrêter projettent de le faire dans le mois à venir (19,9 % en 1999).
Parmi les motivations de l'arrêt, pour conforter le gouvernement dans ses premières intentions, le prix du tabac est désormais en tête (66,8 %) alors qu'il était en quatrième position dans le Baromètre santé ; cette raison devance la peur de tomber malade (47 %) et la prise de conscience des conséquences du tabac sur la santé (17,4 %). Et plus d'une personne sur deux a dans son entourage une personne que la hausse des prix à incitée à limiter ou à cesser sa consommation de tabac.
Les jeunes et les personnes à faibles revenus sont les plus sensibles à l'argument du prix ; ce sont aussi, note l'INPES, les populations les plus résistantes aux actions de prévention. CQFD.
Le gouvernement reculera-t-il plus encore ? « Les débitants de tabac, dit le secrétaire d'Etat au Commerce Renaud Dutreil, n'ont pas à subir les conséquences dans leur sécurité et leurs revenus de (la) politique de santé publique. » La marge de manœuvre est d'autant plus étroite que les planteurs, menacés par une réforme européenne des aides, commencent eux aussi à s'agiter.
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