A l'issue du forum qu'elles ont organisé, les 7 et 8 juin, les quatorze organisations réunies au sein du groupe dit du G14 ont présenté leur plate-forme commune en faveur d'un « système de soins à responsabilités partagées » (« le Quotidien » des 28 mai et 5 juin) comme « une philosophie, un fil rouge » à suivre.
Constitué en début d'année pour « éclairer » la mission de concertation engagée par le gouvernement depuis le Grenelle de la Santé, le G14 comprend trois syndicats de médecins (MG-France, l'Union collégiale des chirurgiens et spécialistes français et le Syndicat national des médecins de groupe), sept autres organisations de professionnels de santé, mais aussi la CFDT, l'Union nationale des syndicats autonomes (UNSA), et les deux plus grosses fédérations de mutuelles. « Les mêmes organisations vont débattre au niveau local, a annoncé Jean-Marie Spaeth, président CFDT de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM). Si, dans ce contexte, il y a un élargissement (à d'autres organisations) , on y est tout à fait favorables. »
Le G14 entend effectuer maintenant un « travail technique » sur des outils, telle la tarification à la pathologie pour les plateaux techniques lourds des médecins spécialistes. Surtout, d'ici les échéances électorales de 2002, le G14 souhaite « que les politiques qui vont partir en campagne se saisissent du projet », souligne le Dr Pierre Costes, président de MG-France. Il s'agit, selon lui, d'éviter l'adoption d' « ordonnances autoritaires » comme en 1996.
Encouragements et critiques
Au cours du forum, qui a ouvert le débat sur un « nouveau contrat social au service de la qualité des soins », le G14 a entendu des encouragements mais aussi beaucoup de réserves de plusieurs « grands témoins » invités. Georges Jollès, vice-président de la CNAM, représentant le Medef, a estimé que cela « augure bien du chantier assurance-maladie qui va s'ouvrir dans les prochains jours » dans le cadre de la refondation sociale menée par le patronat et cinq centrales syndicales de salariés. Il « n'a pas d'opposition de principe à l'idée d'un double conventionnement (c'est-à-dire de conventions caisses-professionnels de santé à deux niveaux), avec un second étage qui intégrerait des clauses contractuelles plus substantielles que dans la convention de base ». Malgré tout, Georges Jollès a souligné la nécessité d'obtenir des « préalables » avant de négocier, en particulier la clarification du champ des responsabilités du Parlement, de l'Etat et des caisses d'assurance-maladie dans la gestion de l'assurance-maladie.
La secrétaire générale de la CFDT, Nicole Notat, a émis un doute sur la faisabilité du projet du G14, dont son syndicat fait pourtant partie : « Les professionnels de santé sont-ils prêts à jouer ce nouveau deal ? S'ils ne saisissent pas cette occasion, toute l'architecture s'écroule ».
Quant au sénateur RPR Charles Descours, il a relevé un point faible : le clivage existant entre le G14 et le G7, composé des autres syndicats médicaux et des syndicats de salariés CGT, Force Ouvrière, CFTC et CGC. « Le prochain forum, ce sera celui des 21 et cela simplifiera le rôle des politiques », a lancé Charles Descours. Selon Claude Evin, député socialiste et ancien ministre de la Santé, l'absence des autres organisations « qui n'ont pas la même démarche, le même abord », est également un motif d' « insatisfaction ».
Angélique ?
Pour l'économiste de la santé Jean de Kervasdoué, professeur au Centre national des arts et métiers, « la crise est beaucoup plus profonde que ne le dit le document » du G14, le système conventionnel étant en « état de mort clinique même si personne n'a encore fait de constat de décès ». Cet ancien directeur des hôpitaux qualifie le texte d' « angélique » dans la mesure où il ne répond pas à une série de questions sur : le contrôle de la non-qualité, le système de formation initiale et continue, le système de rémunération à adopter, l'organisation des systèmes de substitution entre l'hôpital et les soins de ville, les entrepreneurs des réseaux et enfin les moyens d'arriver à un accord entre l'Etat, l'assurance-maladie et les professionnels de santé.
Charles Descours voit aussi dans le texte du G14 « beaucoup de bonnes intentions », mais « un manque de précisions techniques traduisibles en dispositifs législatifs et réglementaires ». « On ne va pas aller plus loin dans la précision des choses, car il faut un débat public et des mesures législatives, a répliqué le Dr Costes. On peut faire la serrure, mais de toute façon, ce n'est pas nous qui avons la clé », a conclu le président de MG-France.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature