De notre correspondante
à New York
Le syndrome de Di George, un des syndromes congénitaux les plus courants, affecte environ un nouveau-né sur quatre mille. Ces enfants naissent sans thymus et sans glande parathyroïde, et présentent des malformations craniofaciales, avec parfois des anomalies cardio-vasculaires qui peuvent être sévères, voire fatales. La plupart des patients ont une délétion d'environ 3 millions de paires de bases sur le chromosome 11 (22q11).
Des études génétiques chez la souris ont suggéré que le gène Tbx1, un facteur de transcription, est très probablement le gène responsable des principaux signes cliniques du syndrome. Toutefois, étant donné l'expression variable du syndrome, il reste à découvrir des gènes modificateurs.
Souris, poisson zèbre, homme
Une équipe, dirigée par le Dr Peter Carmeliet (Center for Transgene Technology & Gene Therapy, Leuven, Belgique), a réussi à identifier un gène modificateur dans ce syndrome génétique complexe, un tour de force rendu possible par la combinaison d'études génétiques chez la souris, le poisson zèbre et l'homme. Le point de départ de l'équipe est l'étude du VEGF chez la souris.
Il a été suggéré que le VEGF (Vascular Endothélial Growth Factor) pourrait intervenir dans l'assemblement du réseau vasculaire primitif, même s'il n'a jamais été impliqué dans des malformations congénitales. Or des anomalies sévères de la disposition des artères thoraciques (artères de l'arc pharyngé) peuvent faire partie du syndrome de Di George. Le VEGF existe au moins sous trois isoformes chez la souris, différentes par leur longueur : VEGF 120, VEGF 164, VEGF 188.
Les chercheurs ont généré des souris qui ne présentent qu'une seule isoforme. Première constatation, l'absence de VEGF 164 cause des malformations congénitales chez la souris (chez les souris VEGF 120/120 ou VEGF 188/188) qui sont très semblables à celles trouvées chez les patients affectés du syndrome de Di George. A savoir, des malformations vasculaires (artères de l'arc pharyngé), cardiaques, ainsi que craniofaciales, thymiques et parathyroïdiennes.
Deuxième constatation : il apparaît, après examen approfondi, que des anomalies vasculaires sont présentes dans tous les organes qui développent ultérieurement des malformations congénitales. Cela suggère que la dysgénésie vasculaire contribue aux malformations congénitales.
Troisième point, : le VEGF interagit avec le Tbx1. En effet, l'expression du Tbx1 est réduite chez les embryons de souris déficients en VEGF 164. Ce point a été confirmé chez le poisson zèbre : des taux réduits de VEGF aggravent les anomalies artérielles de l'arc pharyngé qui sont induites par le déficit génétique en Tbx1.
Une étude préliminaire chez l'homme
Enfin, quatrième point, une étude préliminaire chez l'homme suggère qu'un promoteur variant du VEGF est associé à un risque accru de malformations cardio-vasculaires chez des patients avec syndrome de Di George.
Détenant ces données chez la souris, le poisson zèbre et l'homme, l'équipe propose l'interprétation suivante : « Le VEGF, et en particulier le VEGF 164, est crucial pour le développement normal de l'arc pharyngé, et des taux réduits ou absents de VEGF 164 augmentent le risque de malformations congénitales de l'arc pharyngé », expliquent-ils. « Toute variation allélique du promoteur du VEGF abaissant l'expression du VEGF abaissera aussi l'expression du variant VEGF 165 (l'équivalent du VEGF 164 chez la souris) ». « Par conséquent, si les taux de VEGF 165, chez les embryons humains porteurs de la délétion 22q11, tombent au dessous d'un seuil critique requis pour le bon développement de l'arc pharyngé, le risque de malformations congénitales pourrait augmenter. » Cela révèle donc « un rôle insoupçonné jusqu'ici pour le VEGF dans le développement de l'arc pharyngé », ajoutent-ils.
Des études supplémentaires chez l'homme, préviennent toutefois les chercheurs, « seront nécessaires pour établir avec certitude que les variations du VEGF confèrent un risque accru d'anomalies cardio-vasculaires chez les patients porteurs de la del 22q11 ».
« Nature Medicine », 21 janvier 2003, doi : 10.1038/nm819.
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