CONGRES HEBDO
Pour qu'un genou naturel ou prothétique fonctionne de façon satisfaisante, l'exigence de stabilité est complémentaire et indissociable de l'indolence et de la mobilité. Le genou étant une articulation tricompartimentale, cette stabilité devra être conservée sur la totalité des compartiments, le compartiment fémoro-patellaire et l'ensemble bicompartimental fémoro-tibial.
Cette stabilité qui se décrit comme la jouissance pour le patient d'un mouvement contrôlé et prédictible, nécessite d'être préservée, sur la totalité du secteur de mobilité articulaire, et dans toutes les directions de l'espace.
Les perturbations de la qualité articulaire fémoro-tibiale peuvent se faire dans l'un des trois plans de référence : dans le plan frontal, il s'agit des déplacements anormaux en varus ou en valgus, dans le plan sagittal, des déplacements soit en tiroir antérieur, soit en tiroir postérieur et dans le plan transversal ou horizontal des déplacements rotatoires soit en rotation externe, soit en rotation interne.
Les déplacements élémentaires peuvent se combiner sur un mode plus ou moins complexe.
Un projet opératoire planifié
Très souvent, la pathologie justifiant l'indication du remplacement prothétique comporte déjà une composante plus ou moins importante d'instabilité. L'analyse préopératoire clinique et radiographique précise les éléments constitutifs de cette instabilité : pertes chondrales, osseuses ou ostéo-chondrales intra-articulaires, distensions ligamentaires, déformations squelettiques de voisinage.
L'examen clinique se fait en position debout, puis couchée. Les mouvements traditionnels de testing du genou, en décubitus sur la table d'examen sont également analysés, en précisant le caractère correctible ou non d'éventuelles déformations. L'examen radiographique traditionnel préopératoire (face, profil, fémoro-patellaire) est complété par un cliché d'axes dit de pan-gonographie et des clichés dynamiques à la demande en varus, en valgus forcés ou en tiroir.
Au terme de cette analyse se dégage un profil de perte de stabilité dont l'intervention restauratrice devra obligatoirement tenir compte.
Une technique opératoire encore plus exigeante
La technique opératoire prend en compte les données d'instabilité détectées en préopératoire, mais doit aussi intégrer les déstabilisations délibérées induites par le geste chirurgical, soit pour en faciliter sa réalisation, soit pour rééquilibrer une anomalie préexistante. S'il est admis que la première exigence d'implantation satisfaisante d'une prothèse de genou est l'obtention d'un espace de résection arthroplastique identique en extension et en flexion à 90°, des exigences supplémentaires viennent se rajouter au fur et à mesure que progresse l'intervention ; si bien qu'en fin de compte c'est souvent un compromis de positionnement qui finit par être décidé par le chirurgien implanteur. Ce compromis ne peut en aucune façon trop dévier des exigences validées par l'expérience sous peine de compromettre la longévité de la prothèse.
C'est pourquoi, chaque étape de la technique opératoire devra analyser les conséquences induites en termes de stabilité.
Si, au départ, il convient de relâcher des rétractions ligamentaires pour rééquilibrer les ligaments, il importe de réaliser qu'un tel relâchement est quelque part déstabilisant. Dans le même ordre d'idées, les coupes osseuses, les structures musculo-ligamentaires, les écarts d'espace arthroplastique obtenus, la hauteur de l'interligne articulaire prothétique représentent autant de facteurs influençant la nouvelle stabilité introduite par l'intervention elle-même. Cette stabilité est d'ailleurs testée au fur et à mesure que progresse l'intervention pour éventuellement la corriger et disposer d'un implant approprié à ce type de modification de stabilité.
La majorité des prothèses implantées en ce début de XXIe siècle dérive du modèle dit condylaire total, c'est-à-dire à pièce fémorale et tibiale non solidarisées (par une charnière, par exemple...), et à massif condylien prothétique total, comportant un méplat trochléen. La plupart des modèles sont dits à contraintes minimalisées. Sous ce terme de contraintes, on désigne les forces de solidarisation entre l'implant fémoral et l'implant tibial, au niveau de l'interface articulaire. Ce degré de contraintes intervient considérablement dans la stabilité elle-même.
Suivant la géométrie des surfaces articulaires favorisée par le ou les concepteur(s) du modèle de prothèse sélectionné, cette stabilité sera variable : ainsi, si les surfaces fémorales et tibiales sont très congruentes, la stabilité se trouve augmentée, mais également les contraintes, ce qui est moins favorable à l'ancrage, à long terme des pièces prothétiques sur leur squelette récepteur.
De la même façon, le choix d'une conservation ou au contraire d'un sacrifice du ligament croisé postérieur peut venir imposer l'usage d'un modèle dit postéro-stabilisé, dont la géométrie empêche le passage de la pièce tibiale en arrière de la pièce fémorale (luxation ou subluxation postérieure).
Les gages du succès
L'optimisation de la stabilité prothétique est l'un des gages de succès au même titre que la restitution de la mobilité ou la correction de l'alignement du membre.
Elle commence en préopératoire et se poursuit tout au long de l'intervention. C'est d'elle que dépend le succès immédiat de la prothèse et de sa longévité fonctionnelle.
Un défaut de stabilité résiduel persistant est source de sévères préoccupations :
- d'une part, malgré un résultat radiologique parfois honorable, la satisfaction de l'opéré(e) risque de laisser à désirer ;
- d'autre part, ce défaut de stabilité non seulement risque de s'aggraver au fil du temps, mais il risque d'accélérer le rythme, normalement négligeable d'usure du polyéthylène ; cette usure accélérée est d'ailleurs un facteur compromettant la tenue à long terme de l'implant sur le squelette (descellement).
La surveillance
L'arthroplastie du genou ne se résume pas pour l'opéré(e) et pour son équipe à l'intervention. Une surveillance du patient ou de la patiente porteur(euse) d'une prothèse fait partie de la démarche thérapeutique. Comme pour les prothèses de hanches, il existe un calendrier régulier de contrôle clinique et radiologique destiné à détecter précocement des modifications de fixation de la prothèse au squelette ou encore l'apparition ou l'aggravation de défaut de stabilité.
Cette surveillance a permis de dégager les règles d'une meilleure prise en charge des prothèses à réopérer.
Ces reprises prothétiques sont motivés pour un quart d'entre elles par des défauts de stabilité.
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