LES MALADES atteints d'une affection de longue durée (ALD) reconnue par la Sécu avant le 15 novembre 2005 bénéficient désormais d'un sursis supplémentaire, jusqu'au 31 décembre 2009, pour entrer dans le moule des nouveaux protocoles de soins prévus par la réforme de l'assurance- maladie de 2004. La loi Douste-Blazy du 13 août 2004 avait en effet subordonné la prise en charge à 100 % d'un patient en ALD à la signature d'un nouveau formulaire de protocole de soins par le malade lui-même, son médecin traitant et le médecin-conseil du service du contrôle médical des caisses d'assurance-maladie. Ces protocoles, qui font référence aux recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS), visent à mieux encadrer la prise en charge des pathologies concernées (cancers, diabète, maladies cardio-vasculaires, affections psychiatriques, etc.), et cela sur tous les plans : soins, traitements, voire les travaux et exercices prescrits au patient pour favoriser sa rééducation ou son reclassement professionnel.
Dès le début de leur diffusion en novembre 2005, les nouveaux formulaires Cerfa ont d'abord été exigibles au moment de la déclaration d'une ALD. En revanche, une période transitoire avait été octroyée aux 7 à 8 millions de patients déjà admis au régime ALD avant novembre 2005 (sur simple protocole inter-régimes d'examen spécial ou PIRES), à condition qu'ils jouent le jeu du parcours de soins en ayant désigné un médecin traitant. L'article 35 de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2006 avait ainsi fixé l'expiration de la période transitoire au 1er juillet 2008, afin que les malades ALD puissent en théorie avoir le temps de se munir de leur protocole de soins « new look » et renouveler leurs droits, au fil des référentiels publiés par la HAS. Selon la Haute Autorité de santé, ses guides de recommandations (destinés à aider les médecins à remplir les protocoles de soins) couvrent 67 % des ALD au 1er mai 2008 et sans doute 87 % d'entre elles d'ici à la fin de l'année, sachant que le travail restant porte surtout sur des «maladies très rares»*.
Les responsabilités des services médicaux des caisses ?
Dans son communiqué, le ministère de la Santé ne met du reste pas en cause la HAS, mais plutôt les services médicaux des caisses, pour justifier le prolongement de la période transitoire jusqu'à la fin 2009. Avenue Duquesne, on invoque à cet égard une montée en charge des nouveaux protocoles de soins ALD «plus lente que prévue», dans tous les régimes d'assurance-maladie. D'où un risque de «ruptures de droits inacceptables dans la prise en charge des patients concernés» si la date couperet du 1er juillet 2008 était maintenue en l'état.
Quant à la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM), elle se dit «en phase» avec la mesure ministérielle, mais se défend de faire preuve de lenteur. Avec «environ 160000 protocoles de soins ALD» traités chaque mois par les services médicaux des caisses primaires – dont «40000 en moyenne» correspondent à des renouvellements de droits –, la CNAM assure que la montée en charge progressive des nouveaux protocoles suit un «rythme conséquent».
Quoi qu'il en soit, cette prolongation de la période transitoire démontre le caractère chronophage du traitement des nouveaux protocoles ALD issus de la réforme de 2004. En 2006, une autre procédure provisoire et dérogatoire avait fait une entorse au dispositif du médecin traitant afin que les patients ne se retrouvent pas pénalisés financièrement lorsque leur pathologie était déclarée par un praticien hospitalier. La CNAM avait diffusé une circulaire garantissant une prise en charge à 100 %, même si le protocole de soins n'était pas passé d'emblée par la case « médecin traitant ».
Gérard Raymond, président de l'Association française des diabétiques (AFD), regrette pour sa part que le nouveau formulaire reste «un papier administratif qui n'apporte aucun plus à la prise en charge» des malades en ALD. Le président de l'AFD fait valoir que les actes et les prestations recommandés par la HAS sont loin d'être tous systématiquement prescrits par les médecins.
Le délai de grâce ministériel répond en tout cas à une demande des associations de patients. En attendant la réforme ALD de plus grande ampleur annoncée par le gouvernement…
* Chiffres fournis par son président, le Pr Laurent Degos, le 15 mai dernier, devant les députés de la MECSS (Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la Sécurité sociale).
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