Après avoir semé la terreur dans le quartier londonien de Whitechapel, à la fin du XIXe siècle, Jack l'Eventreur a inspiré une bonne douzaine de films. Les jumeaux prodiges Allen et Albert Hughes, 28 ans à peine (ils ont réalisé leur premier succès, « Menace II Society » à 20 ans), n'ont pas eu peur de succéder à Pabst, Hitchcock et d'autres de moindre envergure.
« Les évocations précédentes de cette histoire nous ont paru bien fades, et empreintes de puritanisme bourgeois », n'hésite pas à dire Allen, tandis qu'Albert souligne que leur film est « une histoire du ghetto. Elle parle de pauvreté, de violence et de corruption, autant de thèmes abordés dans nos films précédents et qui nous fascinent depuis longtemps. Les personnages, cette fois, se trouvent être blancs, mais les pauvres n'ont-ils pas tous les mêmes problèmes ? ».
Les enfants de Detroit se sont glissés d'autant plus facilement dans l'atmosphère anglaise - tout en tournant à Prague - qu'ils ont adapté le roman graphique (c'est plus qu'une BD) d'Alan Moore et Eddie Campbell (publié en France en 2000 par les éditions Delcourt), fruit de dix ans de recherche sur celui qui fut le premier tueur en série à connaître les honneurs de la presse populaire.
Tout en gardant, avec la lumière, les couleurs et une certaine stylisation, un esprit bande dessinée, les réalisateurs n'ont rien sacrifié de la complexité d'une histoire qui mêle les milieux les plus populaires et la plus haute société victorienne. Leur cinéma à l'esbroufe, souvent impressionnant, n'exclut pas le réalisme historique (exclusion sociale, manuvres politiques, antisémitisme populaire, puritanisme, tout est là...) ni la précision anatomique (les instruments chirurgicaux de l'époque ont de quoi faire frissonner, de même que les méthodes psychiatriques...).
On suivra donc avec intérêt l'enquête de l'inspecteur opiomane et visionnaire Fred Abberline, alias Johnny Depp, lui aussi passionné de longue date par l'énigme non résolue de Whitechapel et qui s'est doté pour la circonstance d'un accent cockney. Il est convaincant, comme le sont Ian Holm, Robbie Coltrane, Heather Graham ou Jason Fleming. « From Hell » (de l'enfer), c'est ainsi que Jack commence l'une de ses lettres. Le temps d'un film, on y croirait presque, à l'enfer.
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