Une approche de thérapie génique utilisant un vecteur lentiviral dérivé du VIH se montre très prometteuse. Trois ans après la thérapie développée par une équipe italienne, les six premiers enfants atteints de maladies génétiques sévères et venant des quatre coins du monde sont bien portants et ne montrent aucun symptôme attendu de leur maladie. Trois enfants étaient atteints d’une leucodystrophie métachromatique infantile tardive, qui les condamnait à développer à partir de l’âge de 1 à 2 ans des troubles de la marche et du langage et à décéder rapidement entre l’âge de 3 et 10 ans. Trois autres étaient affectés du syndrome de Wiskott-Aldrich, une maladie génétique liée à l’X caractérisée par un déficit immunitaire combiné, un eczéma et une thrombopénie.
Un vecteur lentiviral
« Trois ans après le début de l’essai clinique, les résultats obtenus chez les 6 premiers patients sont très encourageants : la thérapie est non seulement sûre mais aussi efficace et capable de changer l’histoire clinique de ces maladies sévères. Après 15 ans d’efforts…, c’est très enthousiasmant de pouvoir apporter une solution concrète aux premiers patients », déclare Luigi Naldini, directeur du San Raffaele Telethon Institute for Gene Therapy (TIGET), à Milan.
Les résultats des deux études cliniques sont publiés par Biffi et coll. et Aiuti et coll. dans la revue « Science ».
Dans chaque étude, les chercheurs ont prélevé des cellules souches hématopoïétiques (CSHs) chez les patients, puis ont utilisé un vecteur lentiviral partiellement inactivé pour introduire le gène thérapeutique dans ces cellules ; ces CSHs génétiquement modifiées ont ensuite été réinjectées chez les patients.
Trois enfants présymptomatiques qui étaient atteints de leucodystrophie métachromatique infantile tardive selon les données génétiques, biochimiques et neurophysiologiques, ont ainsi reçu leurs propres CSH portant le gène fonctionnel ARSA (arylsulfatase). Après la réadministration des cellule, les patients montraient un remplacement du gène ARSA étendu et stable, entraînant une expression élevée de l’enzyme dans les lignées cellulaires hématopoïétiques et dans le liquide céphalo-rachidien (LCR). Les enfants apparaissent guéris : ils ne montrent aucun symptôme de la maladie 7 à 21 mois après l’âge prévu d’apparition des symptômes.
« La carte gagnante était de modifier les cellules afin qu’elles produisent la protéine en quantité supérieure à la normale, ceci afin d’enrayer le processus dégénératif », déclare Eugenio Montini, co-auteur. « Jusqu’ici, nous n’avons jamais vu une approche de modification des CSH par thérapie génique qui soit aussi efficace et sûre. »
Leucodystrophie métachromatique et syndrome de Wiskott-Aldrich
Dans la seconde étude, trois enfants atteints du syndrome de Wiskott-Aldrich ont reçu leurs propres CSH portant le gène fonctionnel WAS, après régime conditionnant a minima. Le gène WAS code pour une protéine du cytosquelette. 20 à 32 mois après la thérapie génique, on constate une amélioration ou disparition des symptômes de la maladie tels que les infections récurrentes et l’eczéma.
La thérapie génique lentivirale dans les 2 essais n’a pas entraîné des profils d’intégration du vecteur qui pourraient augmenter le risque de leucémie, le souci majeur des essais de thérapie génique utilisant des vecteurs rétroviraux. Elle représente donc une approche prometteuse pour les maladies génétiques sévères.
Les deux essais, débutés en 2010, ont recruté 16 patients, 10 souffrant de leucodystrophie métachromatique et 6 du syndrome de Wiskott-Aldrich. Les résultats publiés dans « Science » portent sur les 6 patients pour lesquels le suivi est suffisamment long pour tirer les premières conclusions sur l’efficacité et la sécurité du traitement. Au total, la Fondation Téléthon a investi 19 millions d’euros pour la recherche sur ces deux maladies.
Sciencexpress 11 juillet 2013, Biffi et coll., Aiuti et coll.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature