AFFECTION rare, l'acidurie mévalonique se manifeste précocement chez l'enfant par des épisodes récurrents de fièvre et d'inflammation, un retard de développement psychomoteur, une ataxie et une cataracte. Le pronostic est généralement sombre : plus de la moitié des patients décèdent dans la petite enfance et très peu survivent jusqu'à l'adolescence.
Cette maladie autosomique récessive est due à une mutation génétique de la mévalonate kinase. Elle aboutit à un déficit profond de cette enzyme (moins de 1 % d'activité résiduelle), qui intervient au stade précoce de la voie de synthèse des isoprènes, dont les principaux produits comprennent l'hème A, le dolichol, la coenzyme Q10 et le cholestérol. Par suite du défaut enzymatique, l'acide mévalonique s'accumule et est excrété, à taux élevé, dans les urines.
Les mécanismes de l'auto-inflammation créée ne sont pas clairs. Les taux de cytokines pro-inflammatoires sont augmentés durant les épisodes de fièvre et les cellules mononucléées produisent une quantité importante d'IL-1b (après stimulation in vitro).
Dans l'espoir d'améliorer les crises inflammatoires chez un enfant souffrant d'une acidurie mévalonique, l'équipe du Pr Alain Fischer (hôpital Necker - Enfants-Malades, Paris) a tenté pour la première fois une greffe de cellules souches hématopoïétiques à partir de sa soeur HLA-identique (porteuse hétérozygote saine du gène mutant).
L'affection, chez le garçon âgé de 3 ans, aux parents consanguins, avait été diagnostiquée à l'âge de 3 mois. Depuis la naissance, il présentait des épisodes de fièvre, récurrents toutes les deux semaines, menaçant le pronostic vital. Ils s'accompagnaient d'un syndrome inflammatoire important, d'hépatosplénomégalie, d'un retard staturo-pondéral et psychomoteur.
Un traitement anti-inflammatoire par étanercept (inhibiteur du TNF-alpha) et anakinra (antagoniste du récepteur IL1) n'avait pas amélioré son état. Devant l'évolution clinique sévère, l'équipe a proposé une greffe de moelle osseuse.
La mévalonate kinase est passée de 0,6 à 64 %.
La greffe a réussi, avec une sortie d'aplasie à J21 et un chimérisme 96 % donneur. L'activité de la mévalonate kinase dans les lymphocytes sanguins est passée de 0,6 % avant la greffe à 64 % un an plus tard. Le traitement par anakinra a été maintenu jusqu'à J25. L'immunosuppression a été arrêtée à 4 mois.
L'amélioration clinique a été immédiate, l'hépatosplénomégalie a disparu, et, à 15 mois, l'enfant n'a toujours pas de récidive fébrile ou inflammatoire.
Les Drs Haas et Hoffmann (Heidelberg, Allemagne) notent dans un commentaire : «Ce rapport documente une courageuse approche clinique dont le succès suscitera des études sur les liens entre la voie du cholestérol, des isoprénoïdes et les affections auto- inflammatoires, rhumatismales et allergiques… Bien que ces résultats soient encourageants et que la greffe de moelle puisse devenir une option thérapeutique importante dans l'acidurie mévalonique, principalement inflammatoire, des questions importantes demeurent.» Par exemple, détaillent-ils, l'apparition d'une maladie neurologique, puisque l'excrétion de mévalonate provenant des sources extramédullaires reste élevée.
« New England Journal of Medicine », 28 juin 2007, p. 2700, Neven et coll., et 2671.
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