L’INCIDENCE de filarioses pourrait être nettement abaissée dans les pays en développement en suivant de façon rigoureuse les recommandations de l’OMS, éditées dans un programme spécifique (GPELF, Global Programme to Eliminate Lymphatic Filariasis). Ce programme, qui a été développé en 2000, comprend un volet de surveillance épidémiologique et la mise en place d’un traitement annuel des population spar diéthylcarbamazépine et albendazole. Un travail mené en Egypte confirme l’efficacité sur le terrain, en moins de cinq ans de ce type d’initiative de santé publique.
En Egypte, la filariose lymphatique est connue depuis l’époque des pharaons. Dans près de 90 % des cas, cette maladie est liée à une infection par Wucherria bancrofti, un parasite transmis par les moustiques du genre culex. En 1960, l’effet des campagnes de démoustication entreprises dans ce pays s’est traduit par une baisse très significative du nombre des cas. Mais la lutte contre le vecteur s’est ensuite relâchée et, dans les années 1980, le nombre des cas s’est de nouveau élevé.
En 1990, les autorités sanitaires égyptiennes estimaient que plus de 250 000 personnes étaient infectées dans le pays et que 2,5 millions de personnes vivaient dans des régions à risque de transmission, principalement le delta du Nil et la région du plateau du Guizeh.
En septembre 2000, le ministère égyptien de la Santé a mis en place un programme de prévention de la filariose dans quatre villages de deux régions du pays. Dans les villes de la région de Guizeh, la prévalence de la filariose est plus élevée que dans la moyenne du pays, alors que, dans celle de Qalubyia, elle est considérée comme inférieure à la moyenne.
Un traitement annuel en dose unique.
Au total, plus de 2 500 000 personnes ont bénéficié d’un traitement annuel en dose unique par 6 mg/kg de diéthylcarbamazine associés à une dose fixe de 400 mg d’albendazole. Le traitement devait être absorbé au moment où il était donné par l’auxiliaire de santé et en sa présence, afin de contrôler la prise des médicaments. Seuls les femmes enceintes et les enfants de moins de 2 ans étaient exclus de la prévention. Plus de 80 % de la population ont bénéficié de la distribution des médicaments, proportion que l’équipe du Dr Reda Ramzy qualifie de remarquable pour le pays.
Pour estimer l’efficacité d’une telle prise en charge, les auteurs ont choisi d’analyser trois variables distinctes : la mesure directe de la microfilarémie et de l’antigénicité circulante ; le taux des anticorps dirigés contre l’antigène Bm14 chez les enfants de 7 à 8 ans ; le taux de parasite présent chez les moustiques prélevés en zone urbaine à l’intérieur des habitations.
Dans la région de Guizeh, la prévalence de microfilarémie est passée, en cinq ans, de 11,5 à 1,2 % et celle de l’antigénémie circulante a chuté de 19 à 4,8 %. Dans les deux villages de Qalubia, ces chiffres sont passés respectivement de 3,1 à 0 % et de 13,6 à 3,1 %. Chez les enfants en âge scolaire, des anticorps étaient détectés chez 18,3 % des enfants de la région de Guizeh en 2000 et ce chiffre s’établissait à 0,2 % après cinq années de traitement des populations. Dans la région de Qalubia, ces valeurs étaient respectivement de 1,7 et de 0 %. Une baisse similaire de la présence des antigènes a été retrouvée dans les deux régions analysées (de 10 à 0 % et de 1,7 à 0 % ). Enfin, chez l’animal, l’incidence d’une parasitémie est passée de 3,7 à 0,19 % dans la région de Guizeh et de 4,37 à 0 % dans celle de Qalubia.
Dans un éditorial, le Dr David Molyneux (Liverpool) explique que ce travail confirme la validité du programme mis en place par l’OMS. Il estime que, désormais, ce programme devrait être financé pour les 83 pays dans lesquels vivent les 120 millions de personnes atteintes, dont 40 millions présentent des séquelles de la filariose invalidantes dans leur vie quotidienne.
« The Lancet », 25 mars 2006, vol. 367, pp. 966-969 et 992-999.
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