La baisse du taux de remboursement des médicaments homéopathiques de 65 à 35 %, prévue dans le PLFSS 2004, consterne les deux syndicats médicaux les plus concernés.
Le Syndicat national des médecins homéopathiques français (SNMHF, fondé dès 1932, « 800 adhérents » revendiqués) qualifie cette mesure d' « économiquement absurde », compte tenu du probable « transfert vers des produits allopathiques plus chers et mieux remboursés », « socialement injuste et éthiquement condamnable car elle remet en cause le libre choix des patients ». La présidente du SNMHF, le Dr Dominique Jeulin-Flamme, souligne que la part de l'homéopathie dans les dépenses totales de pharmacie est passée « de 1,4 % en 1984 à 0,8 %, selon la CNAM (Caisse nationale d'assurance-maladie), alors même que ce secteur touche désormais non plus 20 % mais 40 % de la population soignée ». Avec les mêmes types de patients (hormis une surreprésentation de 3 % des enfants et adolescents), « le taux de revoyure des médecins homéopathes est plus faible que leurs confrères généralistes. On est convaincus qu'on est source d'économies », ajoute le Dr Jeulin-Flamme. Le SNMHF conteste cette « agression » faite aux médecins homéopathes alors qu'ils sont justement « engagés dans une démarche d'évaluation ». Le syndicat appelle « les 5 000 médecins homéopathes » à se mobiliser et à sensibiliser les patients, les parlementaires, par « des tracts et des pétitions », précise le Dr Jeulin-Flamme.
Au Syndicat de la médecine homéopathique (SMH-Alliance, qui affiche « plus de 500 adhérents » et se revendique comme « le premier syndicat » du secteur), le Dr Jean-Manuel Tétau ne peut cacher sa « colère ». Il reconnaît que le déremboursement total de l'homéopathie envisagé autrefois, notamment par le plan Juppé de 1995, n'est pas à l'ordre du jour. « Le gouvernement, dans sa grande mansuétude, a un peu réfléchi », note le président du SMH. Evoquant la question des « transferts » de dépenses, le Dr Tétau s'insurge contre une mesure « élitiste », compte tenu de l'inégalité des couvertures complémentaires. Il en constate « un désengagement progressif de l'Etat vis-à-vis des petits risques », pour laisser place « sans le dire » à un système « à l'américaine » avec un rôle croissant des assurances privées.
La Mutualité française est également montée aussitôt au créneau. Son président, Jean-Pierre Davant, a critiqué le « nouveau transfert de charges de l'assurance-maladie vers les mutuelles », notamment à travers la hausse du forfait hospitalier et la baisse du taux de remboursement des médicaments homéopathiques.
Comme on pouvait s'y attendre, les laboratoires les plus touchés par cette mesure, Boiron et Dolisos, protestent aussi. Selon Christian Boiron, P-DG des laboratoires du même nom (leader sur le secteur avec 65 % de part de marché revendiqués), la mesure jette un « discrédit sur l'ensemble » de l'homéopathie et devrait donc aboutir à « un effet de transfert au profit des médicaments allopathiques (quatre à cinq fois plus chers) ».
Quant aux Laboratoires Dolisos (détenus à 86 % par le groupe Pierre Fabre et « 2e producteur mondial dans le domaine de l'homéopathie »), ils dénoncent une « fausse économie » sur des médicaments « dont les prix sont bloqués depuis quinze ans » et une « mesure socialement discriminatoire (...) surtout pour les personnes ne bénéficiant pas d'une couverture d'assurance complémentaire ». Ce déremboursement partiel, poursuit ce laboratoire, « réduit de fait le choix du patient et sera à l'origine de sérieux problèmes sur l'activité des médecins prescripteurs ». Enfin, la mesure constitue « un véritable désavu de la communauté scientifique française immolée sur l'autel d'un faux problème », alors que la France « est un acteur majeur au niveau mondial ».
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