De notre correspondante
à New York
« Nous avons constaté que les stents enrobés de sirolimus ont un effet profond sur la durabilité du stenting. Les événements récurrents sont réduits de 75 % et surviennent ainsi chez moins de 5 % des patients », explique au « Quotidien », le Dr Jeffrey Moses (Lenox Hill Heart and Vascular Institute of New York), qui a dirigé l'étude multicentrique. « Plusieurs études cliniques ultérieures ont confirmé ces résultats », ajoute-t-il. « Nous élargissons maintenant nos études à des patients plus complexes. Nous espérons établir ce traitement comme norme de soin pour la plupart des obstructions coronaires. Avec un peu de chance, nous pourrons réduire radicalement la nécessité d'un pontage coronarien. »
La mise en place d'un stent métallique, après dilatation par ballonnet d'une sténose coronarienne, abaisse la récidive de sténose du vaisseau dilaté. Malgré tout, le risque de resténose reste de 10 à 20 % chez les patients, et s'élève même jusqu'à 60 % dans certains sous-groupes (avec diabète, lésions coronariennes longues ou petits vaisseaux coronariens). Cette resténose survient parce que les cellules musculaires lisses migrent à partir de la paroi artérielle vers la lumière du stent, où elles prolifèrent, créant une hyperplasie néo-intimale et une sténose.
Puissants effets immunosuppresseurs
Depuis quelques années, un espoir se porte sur les stents enrobés de sirolimus (rapamycine). La molécule, découverte initialement dans un échantillon de terre de l'île de Pâques, est un macrolide produit par une bactérie de l'espèce Streptomyces. Ses puissants effets immunosuppresseurs ont rapidement été observés. La découverte de ses propriétés d'inhibition de la prolifération et de la migration des cellules musculaires lisses a stimulé le développement de stents encapsulés d'un polymère le libérant de façon prolongée. Le sirolimus interagit avec des protéines régulant le cycle cellulaire et inhibe la division cellulaire.
Des études randomisées chez des patients porteurs d'une lésion coronaire simple (à faible risque de resténose) ont montré l'effet prometteur de ces stents enrobés. Ainsi, l'étude française RAVEL (« New England Journal of Medicine », 2002) montre que le risque de resténose à six mois est de 26 % avec le stent standard, mais nul avec le stent au sirolimus. De plus, il est montré que l'inhibition de l'hyperplasie néointimale persiste à deux ans de suivi.
L'étude américaine SIRIUS menée chez des patients porteurs d'une lésion coronarienne complexe est publiée dans le « New England Journal of Medicine ». Multicentrique (53 centres), elle porte sur 1 058 patients ayant une sténose coronarienne et une maladie coronarienne complexe du fait de la présence d'un diabète (26 %), de lésions longues (14,4 mm en moyenne) ou de petits vaisseaux (2,8 mm en moyenne). Les patients ont été randomisés, en double insu, pour recevoir, après dilatation de la sténose un stent soit standard, soit enduit de sirolimus.
Taux d'échec réduit
Le bénéfice du sirolimus chez ces patients complexes est confirmé dans tous les sous-groupes examinés. Le taux d'échec (décès d'origine cardiaque, infarctus et nouvelle revascularisation percutanée ou chirurgicale) est réduit à 8,6 % avec le stent au sirolimus, contre 21 % avec le dispositif standard.
Cette réduction est due principalement à une baisse de la nécessité de revascularisation (4 % avec stent au sirolimus contre 16 %). Le bénéfice est aussi observé dans le groupe de diabétiques à risque élevé de resténose (18 % contre 51 % avec stent standard). L'hyperplasie néo-intimale est réduite avec le stent au sirolimus, comme le montrent l'angiographie et l'échographie intravasculaire.
Il reste à savoir, s'interroge dans un commentaire le Dr Andrew Marks (Columbia University, New York), combien de temps persiste l'effet inhibiteur du sirolimus, et si la même molécule donnée par voie orale entraînera le même degré d'inhibition de la resténose intrastent.
« New England Journal of Medicine », 2 octobre 2003, pp. 1315 et 1307.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature