La sténose aortique est, en Europe, la plus fréquente des valvulopathies, puisqu'elle représente près de 45 % des atteintes valvulaires « natives ». Son pronostic, même à un stade modéré, est loin d'être bon, l'évolution rapide vers le stade sévère de l'affection étant commune. D'où la nécessité de dépister et prendre en charge précocement ces patients. « Les avancées spectaculaires de l'échographie permettent aujourd'hui de mieux cibler les indications opératoires, à condition de les utiliser à bon escient et de façon adéquate » a précisé le Pr Vahanian.
L'échocardiographie occupe une place prépondérante dans le diagnostic. Tous les patients ne relèvent pas d'une intervention. Celle-ci ne doit être proposée qu'à des sujets sélectionnés. La première condition est que la sténose soit importante. L'évaluation de la sévérité, fondée sur le calcul de la surface de la valve aortique et sur le gradient moyen, représente donc une étape clé. Les candidats à l'intervention sont tout d'abord les sujets présentant une mauvaise tolérance à l'effort. A l'inverse des patients symptomatiques chez lesquels l'épreuve d'effort est contre-indiquée, elle est ici un outil utile pour la stratification du risque de sténose. Les patients asymptomatiques ayant un gradient de pression très élevé, ou progressif et les patients porteurs de calcifications valvulaires importantes sont aussi des groupes à haut risque d'événements graves à court terme et relèvent de l'intervention chirurgicale. Enfin, les patients ayant une mauvaise fonction ventriculaire gauche ou une importante hypertrophie du ventricule gauche peuvent aussi être confiés au chirurgien. Ces interventions précoces sont particulièrement bénéfiques si les patients sélectionnés sont encore jeunes et actifs. A l'opposé, une intervention ne doit pas être envisagée chez les sujets âgés asymptomatiques.
En l'absence d'indication chirurgicale, la règle est de surveiller les patients à intervalles réguliers, de les prévenir et de les éduquer sur la prévention de l'endocardite bactérienne et surtout sur la possible apparition de symptômes comme l'angine de poitrine, la syncope, la dyspnée, afin d'éviter la survenue d'une mort subite.
Moins fréquente que la sténose aortique, puisqu'elle ne concerne que 12 à 13 % des valvulopathies en Europe, la sténose mitrale a vu son traitement évoluer durant les quinze dernières années grâce au développement de la cardiologie interventionnelle. A côté du traitement médical, se sont progressivement imposés le remplacement valvulaire prothétique et la dilatation par ballonnet, deux méthodes thérapeutiques complémentaires qui ont presque complètement supplanté la commissurotomie à cur ouvert dans les sténoses mitrales sévères.
Dans les sténoses mitrales symptomatiques, la préférence pour l'une ou pour l'autre méthode est fonction de l'existence ou non de contre-indications. La thrombose de l'oreillette, les calcifications valvulaires importantes, une insuffisance mitrale représentant les principaux freins à la dilatation par ballonnet. L'attitude thérapeutique est en revanche plus discutable face à une valve mitrale légèrement calcifiée. Chez ces patients, la chirurgie est efficace, mais il ne faut pas méconnaître le risque thromboembolique à long terme lié à la mise en place de la prothèse. Quant à la dilatation par ballonnet, elle donne globalement de moins bons résultats, sauf chez certains malades soigneusement sélectionnés : sujets relativement jeunes, en rythme sinusal, à un stade précoce de la maladie.
Pour les patients qui ont une sténose mitrale sévère avec peu ou pas de symptômes, la dilatation par ballonnet a la faveur des spécialistes nord-américains et européens, à condition qu'elle soit réalisée par des équipes très expérimentées et que les patients soient jeunes avec une anatomie relativement favorable afin d'espérer un geste efficace et à faible risque. Chez ces patients, la dilatation par ballonnet est indiquée lorsqu'il existe un marqueur de haut risque thromboembolique, tel un antécédent d'accident embolique, complication la plus fréquente de la sténose mitrale (1 cas sur 5) ou l'arythmie complète. La dilatation peut aussi être proposée chez des sujets avec signes objectifs de mauvaise tolérance comme une hypertension artérielle pulmonaire au repos ou à l'effort, même s'ils ne se déclarent pas symptomatiques, et plus rarement chez des femmes jeunes qui souhaitent avoir une grossesse. Enfin, le patient porteur d'une sténose mitrale asymptomatique chez lequel une intervention extracardiaque majeure est envisagée peut bénéficier de la dilatation par ballonnet.
D'après un entretien avec le Pr Alec Vahanian (président de la Fédération française de cardiologie, hôpital Bichat, Paris).
Vers un traitement médical des calcifications valvulaires
La recherche fondamentale s'intensifie pour mieux comprendre quel est le mécanisme des calcifications importantes retrouvées au niveau des valves en cas de sténose aortique. Pour le Dr Jacob (INSERM, Bichat) des vésicules apoptotiques seraient des sites potentiels de calcification sur la valve, et pour l'équipe de Nantes, des facteurs génétiques pourraient expliquer ces sténoses aortiques calcifiées
Dans le futur, ces travaux fondamentaux pourraient déboucher sur des perspectives prometteuses pour le traitement médical, notamment par l'intermédiaire des statines ou des inhibiteurs de l'enzyme de conversion, mais cela doit être validé par des essais cliniques.
Dr I. S.
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