Pourquoi faudrait-il prescrire une statine chez les patients qui n'ont jamais été victimes d'un infarctus du myocarde ou d'une autre pathologie cardiaque ? Et sans taux élevé de cholestérol ? Tout simplement parce la prise de rosuvastatine réduit le risque de survenue d'un événement cardiaque selon les résultats de l'étude HOPE III (heart outcomes prevention evaluation) présentés à l'American college of cardiology. Ces résultats sont susceptibles de modifier en profondeur la prise en charge de millions de patients dans le monde. Avant la présentation de cet essai, l'intérêt d'un traitement par statine n'était pas discuté lorsque s'était déjà produit un événement cardiovasculaire ou de niveau élevé de LDL cholestérol. En revanche, les statines n'avaient pas d'indication chez les patients à risque intermédiaire défini par le risque annuel évalué à 1 % de survenue d'un événement cardiovasculaire. Par ailleurs, ces patients ne devaient jamais avoir été victimes de pathologies cardiaques. C'est cette barrière qui vient d'être levée avec HOPE III. D'autant que ces nouvelles données ne concernent pas seulement les populations à majorité blanche et revenus élevés d'Amérique du Nord ou de l'Europe. Elles s'adressent à l'ensemble des sujets présentant un risque cardio-vasculaire intermédiaire. Près de 80 % des pathologies cardio-vasculaires frappent des individus qui habitent dans des pays peu développés ou à revenus intermédiaires, soulignent les auteurs de l'étude.
D'où l'idée de mener ce vaste essai réellement international, multicentrique, randomisé contre placebo dans 221 centres répartis dans 21 pays. Entre avril 2007 et novembre 2010, 12 705 personnes ont été incluses dans le protocole. 6 361 ont reçu de la rosuvastatine, 6 344 le placebo. La moyenne d'âge s'est établie à 65,7 ans. Résultat principal, la survenue d'événements cardio-vasculaires (décès de cause cardio-vasculaires, infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral), a été statistiquement plus faible dans le groupe statine comparé au groupe placebo lors d'un suivi de 5,6 ans. 235 participants ont été victimes d’un événement (3,7 %) dans le groupe rosuvastatine versus 304 (4,8 %) dans le groupe placebo. Quant au second critère, il associe le nombre des événements déjà comptabilisés au nombre de procédure de revascularisation, d’insuffisance cardiaque et des arrêts cardiaques. Là encore, les résultats sont en faveur de la prescription de la rosuvastatine (353 versus 473 dans le groupe placebo). Le nombre d’AVC et d’IDM est nettement réduit dans le groupe rosuvastatine. Ce bénéfice augmente dans le temps. Quant aux effets iatrogènes, leur fréquence est celle qui était attendue, notamment en matière de crampes ou de douleurs musculaires. Enfin, dans l’essai HOPE III, aucune surveillance biologique ou de visite de contrôle n’avaient été programmées. Ce qui contribue à rendre acceptable le coût de cette prévention dans les pays émergents par exemple.
Bref, cette bonne nouvelle devrait être saluée par tous sauf peut-être par Philippe Even, le contempteur des statines, qui voit là son argumentation contredite…
http://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa1600176ticleDiscussion
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