Dès les premiers signes d'une épidémie de SRAS dans la région de Hong-Kong, l'OMS a pu établir un lien entre les cas recensés et le cas index survenu dans cette ville : un médecin chinois ayant effectué un séjour à l'hôtel Métropole à l'occasion d'un mariage à la fin février 2003. C'est à partir de ce cas unique que l'épidémie s'est propagée au Vietnam, au Canada et en Allemagne puis dans d'autres pays d'Europe, d'Amérique et en Asie. Mais, dès cette date, les infectiologues savaient aussi que les premiers cas étaient survenus en Chine, dans la province de Guangdong, dès novembre 2002.
L'OMS a donc pu établir que le premier cas répondant à la définition nosologique de la maladie était survenu à Fosham, un ville de plus d'un million d'habitants située à 20 km de Canton, le 16 novembre 2002. Ce patient n'avait pas bénéficié de prélèvements sérologiques, ni de bilan paraclinique et aucune conformation virologique de la présence de coronavirus n'a pu être obtenue. C'est à partir de l'analyse de l'observation clinique de ce patient que le diagnostic a été établi par les autorités sanitaires.
Le premier cas à Fosham, à 20 km de Canton
Le 17 décembre un restaurateur de la ville de Heyuan (située à une centaine de kilomètres de Canton), habitué à cuisiner des animaux sauvages, a présenté un tableau de pneumopathie atypique, secondairement identifié comme un SRAS. Cet homme a contaminé sa femme, ses deux surs et 7 personnes travaillant dans l'hôpital où il était soigné. Cliniquement, il présentait un fièvre élevée et des signes respiratoires modérés. L'examen radiographique a retrouvé des opacités pulmonaires bilatérales. Peu après ces cas survenus à Heyuan, une épidémie similaire a été rapportée à Zhongshan, située à 90 km de Canton. Entre le 26 décembre 2002 et le 20 janvier 2003, 28 personnes ont été hospitalisées en raison d'une pneumopathie atypique (10 hommes, 18 femmes, âgés de 1 à 58 ans) ; 13 de ces 28 patients faisaient partie du personnel hospitalier de la ville et 4 ont dû être traités par ventilation assistée.
A partir du 12 janvier 2003, les cas complexes de pneumopathies atypiques survenus dans la province de Guangdong ont tous été transférés dans des hôpitaux de Canton. Néanmoins, on considère que, dans cette ville, l'index est celui d'un commerçants en fruits de mer de 46 ans hospitalisé le 31 janvier 2003 dans un hôpital universitaire de la ville. Cet homme avait séjourné dans la ville de Zhongshan à la mi-janvier. Bien qu'il n'ait été hospitalisé que dix-huit heures, il a été à l'origine de la contamination de 30 soignants. Il a ensuite été transféré par ambulance à un hôpital de plus grande taille et, durant ce transfert, l'ambulancier, les deux médecins et les deux infirmières ont été contaminés. Les 8 jours suivants, plus de 20 membres du personnel médical a aussi présenté des signes de la maladie et 19 membres de la famille ou amis du cas index ont aussi été hospitalisés.
Dans le « Lancet », le Dr Malek Peiris considère que « cet homme est à lui seul l'origine de la deuxième vague d'épidémie survenue à Canton ». A la mi-février, un des médecins qui a soigné les personnes contaminées lors du séjour du cas index à l'hôpital de Zhongshan a effectué un voyage à Hong-Kong pour un mariage et c'est à partir des contamination liées au contact de ce médecin durant son séjour que l'épidémie s'est propagée à travers le monde.
Deuxième vague à Canton
Outre cette recherche épidémiologique descriptive, l'équipe de Peiris a procédé à une analyse du génome du coronavirus retrouvé chez 55 patients hospitalisés dans la région du Guangdong entre le 24 janvier et la 18 février 2003. Ils ont ainsi pu établir un lien phylogénétique entre les premières souches virales individualisées et les souches isolées par la suite chez les patients hospitalisés à Hong-Kong et au Canada, en Allemagne et au Vietnam.
En outre, les auteurs expliquent que « l'analyse des différents génomes permet d'exclure de façon formelle la possibilité que le coronavirus du SRAS ait été généré par une recombinaison entre deux coronavirus humains ou animaux, en raison de l'absence d'homologies entre les coronavirus déjà connus et celui à l'origine du SRAS. Ce virus est donc le fruit d'un passage de la barrière d'espèce qui se serait fait de façon récente à partir d'animaux sauvages en contact de façon exceptionnelle avec l'homme, plutôt qu'à partir d'animaux domestiques ». Enfin, le Dr Peiris souligne que, en raison du climat particulier et de la densité de population locale, la région du Guangdong est propice au passage des zoonoses à l'homme : c'est en effet dans cette région qu'a émergé en 1997 et 2003 un nouveau variant du virus de la grippe particulièrement pathogène, H5N1.
« The Lancet », vol. 362, pp. 1353-1358, 25 octobre 2003.
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