Près de trois mois après le déclenchement de l'alerte mondiale, peut-on déjà tirer des leçons du SRAS ? « Sans doute, mais avec modestie car les nouvelles épidémies, et les nouveaux virus qui les produisent, sont peu prévisibles », écrit le Pr Gilles Brücker, directeur général de l'Institut de veille sanitaire (InVS) dans un numéro spécial du BEH(1) tout entier consacré au syndrome respiratoire aigu sévère.
Le 15 mars, l'OMS lance, pour la première fois de son histoire, une alerte épidémiologique mondiale. Une réponse rapide qui aurait pu l'être plus encore si la Chine n'avait caché l'épidémie de pneumonie atypique qui sévissait dans la province de Guangdong depuis novembre 2002.
Le réseau qui a été mis en place est devenu « un outil indispensable, et donc hautement stratégique », soulignent les membres du département international et tropical de l'InVS. La France et l'Europe doivent renforcer leur présence dans les réseaux de veille sanitaire et les instances chargées de leur coordination.
En France (2), où l'on comptait fin mai 7 cas probables, le système de prise en charge des cas s'est inspiré du plan Biotox et a pu être mis en place très rapidement. Mais même si le nombre de signalements a considérablement baissé, la surveillance mobilise d'importances ressources humaines et la question de la pérennisation du système se pose, estime Isabelle Bonmarin au nom du Groupe SRAS.
Comment contrôler la transmission du SRAS ? De nombreuses inconnues qui persistent, analysées par Daniel Lévy-Bruhl, Isabelle Bonmarin, Jean-Claude Desenclos (département des maladies infectieuses de l'InVS). Les mesures décidées au début de l'épidémie sur la base d'hypothèses simples - isolement des cas suspects, respect de précautions par les soignants, mise en quarantaine pendant dix jours des personnes ayant eu un contact proche avec un cas probable - ont permis l'absence de transmission en France à partir des 7 cas probables, l'interruption de la transmission au Vietnam, la maîtrise de l'épidémie à Singapour.
« Cependant, cette politique de contrôle ne doit pas être celle de l'exclusion, ou de la quarantaine arbitraire, au nom d'un principe de précaution parfois déraisonnable, peu efficace ou susceptible d'effets pervers », met en garde le Pr Brücker dans son éditorial . « Il n'y aura pas d'étanchéité frontalière absolue pour les virus », insiste-t-il.
(1)- N° 24-25/2003, 3 juin.
(2) - informations au 0800-150-160- et sur le site www.invs.sante.fr
Quelques données
- L'OMS estime la létalité de la maladie à environ 15 %. Elle augmente avec l'âge (de 1 % pour les moins de 24 ans à 50 % pour les pus de 65 ans).
- La maladie se transmet de personne à personne lors de contacts proches. Deux éléments sont nécessaires à l'émergence d'un foyer : un ou plusieurs cas index fortement contaminateurs et un environnement (hôpital ou autre) permettant cette transmission. Il ne semble pas y avoir de transmission spontanée du SRAS dans la population générale.
- Les cas secondaires diagnostiqués en France semblent montrer qu'un contact court suffit à transmettre la maladie.
- Le tableau clinique débute souvent assez brutalement, après une incubation de deux à dix jours, par de la fièvre et des signes généraux auxquels s'associent plus ou moins rapidement des signes respiratoires.
- A la période d'état, la symptomatologie est faite de fièvre (94 %), de syndrome grippal (72,3 %), de frissons (65,4 %), de malaise (64,3 %), d'anorexie (54,6 % et de myalgies (50,8 %).
- Le traitement est symptomatique : antibiothérapie orientée vers le traitement d'une pneumonie bactérienne, éventuellement oxygénothérapie (en fonction de la désaturation), et corticothérapie (en fonction du risque de SDRA). Le recours à la ribavirine est très discuté.
- La sortie de l'hôpital est possible après quarante-huit heures d'apyrexie ; elle sera suivie d'une semaine de quarantaine à domicile, renouvelable après évaluation à sept jours.
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