La virulence du ou des virus à l'origine du SRAS est-elle en train de se modifier ? Dans l'état actuel des choses, il est encore difficile de répondre. D'une part, parce que l'agent infectieux à l'origine de la maladie n'a pas encore été formellement identifié, et, d'autre part, parce que les deux faits sur lesquels certains infectiologues se fondent pour étayer cette hypothèse - la notion de « super-transmetteurs » et les décès de sujets jeunes à Hongkong - peuvent connaître différentes origines.
Super-transmetteurs : la controverse
L'existence de « super-transmetteurs » fait déjà l'objet d'une controverse. Dès le début de l'épidémie, il semble que certains malades aient été à l'origine de contaminations multiples, alors que, pour d'autres, aucune contagion n'a existé. Pour l'OMS, « cette notion de "super-transmetteur" n'est fondée sur aucune preuve médicale. Il semblerait que les meures de protection mises en place de façon systématique dans certains pays depuis plus d'un mois permettent un moindre degré de contamination ». Néanmoins, comme l'explique au « Quotidien » le P François Freymuth, virologue à l'hôpital de Caen, « si l'on se réfère à certains modèles d'infections respiratoires - grippe ou VRS -, il semble que la quantité de virus excrétée est variable selon les patients et la symptomatologie clinique. Les individus sont inégaux devant les virus et il est possible qu'il existe une majoration de la multiplication virale au sein des tissus de l'arbre bronchique liée à certains conditions physiopathologiques ». Enfin, la possibilité de l'existence d'un variant plus virulent ne peut, dans l'état actuel de la recherche, être exclue.
Par ailleurs, les premiers décès, à Hongkong, de patients atteints de SRAS, âgés de moins de 40 ans et ne présentant pas de pathologie intercurrente, soulèvent aussi l'hypothèse d'une modification de virulence des souches pathogènes.
Au début de l'épidémie, la grande majorité des décès qui ont été déplorés concernait des sujets âgés ou des personnes à haut risque. Depuis moins d'une semaine, des personnes jeunes vivant à Hongkong sont à leur tour décédées. « On ne connaît pas encore la cause de ces décès mais il peut, là aussi, s'agir d'une variation de virulence, mais un effet indésirable du traitement ne peut être exclu », analyse le Pr Freymuth. Le virologue signale que « le nombre de cas atteignant les enfants semble encore relativement faible, contrairement aux autres pathologies respiratoires. Cette donnée reste encore difficile à expliquer. Si la moyenne d'âge des personnes infectées - qui est de 39 ans actuellement - baisse dans les semaines à venir, nous pourrons affirmer que l'épidémie se transforme en pandémie ».
Enfin, les chercheurs du CDC signalent que le génome qu'ils ont séquencé diffère de 1 000 paires de bases environ de celui publié par les Canadiens. Pour le Pr Freymuth, « il pourrait s'agir de variations épidémiologiques liées aux souches circulantes dans les différentes parties du globe. Si les gènes codant pour certaines protéines telles que la polymérase sont modifiés, il peut exister une variation de la virulence entre les différentes souches ».
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