C'est reparti pour un tour ! La Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) fait ouvrir beaucoup d'agendas ces jours-ci afin d'organiser prochainement une première réunion de négociations conventionnelles pour les médecins spécialistes. La caisse répond ainsi au vu d'une convention transitoire jusqu'au 31 décembre 2004, vu exprimé successivement par le Syndicat des médecins libéraux (SML) puis Alliance (« le Quotidien » des 10 et 21 octobre), qui sont respectivement les troisième et quatrième syndicats de médecins spécialistes libéraux, selon l'enquête de représentativité menée en 2002.
Pour le président de la CNAM, la nouvelle n'a rien d'exceptionnel. « Je n'ai jamais caché que, lorsqu'il existe une telle demande d'au moins une organisation, elle est de droit », déclare au « Quotidien » Jean-Marie Spaeth, qui ne souhaite pas en dire davantage tant qu'une date et un ordre du jour n'ont pas été fixés.
Si cette réouverture de négociations conventionnelles est « de droit », elle constitue en tout cas le nouvel épisode d'un feuilleton déjà riche en rebondissements, après la rupture des précédentes négociations en avril, la signature insolite d'un projet de règlement conventionnel minimal (RCM) entre les caisses et le syndicat CSMF fin août, et enfin l'adhésion du SML en septembre à la convention généraliste de 1998 (reconduite par défaut en mai).
L'idée d'une convention transitoire jusqu'à la fin de l'année 2004 qui se substituerait au RCM modifié depuis le 25 septembre paraît en tout cas incongrue aux yeux du président de la CSMF. Le Dr Michel Chassang s'en tient au RCM publié sous l'autorité du ministre de la Santé et ne cesse de répéter que le système conventionnel est mort tant que la réforme de l'assurance-maladie ne l'aura pas fait renaître sous une forme rénovée.
Chassang : « Ce n'est pas mon problème »
Interrogé sur l'éventualité d'une réunion de négociations conventionnelles fin novembre ou début décembre, le président de la CSMF répond sans ambages : « Ce n'est pas mon problème ! » Il est clair que l'initiative conventionnelle du SML vise à gêner la CSMF, son ancienne alliée devenue sa rivale depuis qu'elle a signé seule un texte de revalorisations ciblées, texte extrêmement controversé à la fin de l'été. Mais, au-delà des « tactiques » syndicales, le Dr Chassang se dit « davantage préoccupé par des choses plus importantes », en particulier la future classification commune des actes médicaux (CCAM), au sujet de laquelle la CSMF recueille les premières doléances des spécialités, et, bien sûr, la réforme de l'assurance-maladie.
Quant à une éventuelle participation de la CSMF à cette réunion conventionnelle, le Dr Chassang prévient que sa confédération ne prendra « aucune décision ni aucune position avant qu'une date ne soit fixée », même s'il « a bien noté que Jean-François Rey [président de l'UMESPE, la branche spécialiste de la CSMF, NDLR] était partisan d'y aller ».
A la Fédération des médecins de France (FMF), le Dr Jean-Claude Régi est vraiment sceptique. « Cela devient burlesque, je ne sais plus où l'on en est », lâche-t-il. « Si ce n'est pas de l'agitation, qu'est-ce que c'est ? » s'interroge le Dr Régi. Le président de la FMF ne veut pas se prononcer sur la participation ou non de son organisation à une première réunion de négociation sans consulter au préalable ses instances. Cependant, à titre personnel, le Dr Régi se montre très perplexe : « Sincèrement, je ne vois pas ce qu'il y a à négocier. Il n'y a aucune base nouvelle, il n'y a pas un sou de plus dans les caisses, et il y en a plutôt moins qu'avant. »
Le président du SML balaie cet argument du revers de la main : « Ceux qui disent ça avant une négociation sont perdants. » Le Dr Dinorino Cabrera reconnaît néanmoins qu'il « ne part pas la fleur au fusil en disant qu'(il) va obtenir des millions » pour les médecins spécialistes. Mais il s'agit pour lui de mettre un terme à « une situation aujourd'hui ridicule », dès lors que la CSMF « ne négocie pas officiellement mais sort des CPP » (contrats de pratiques professionnelles).
Le Dr Félix Benouaich, président d'Alliance, estime qu'une convention transitoire serait « plus logique pour soulager les spécialistes de secteur I », dont les charges sont alourdies, notamment à cause de leur assurance en responsabilité civile professionnelle.
Quels que soient les avantages immédiats qu'une convention spécialiste transitoire pourrait contenir, ses défenseurs visent aussi et surtout à préserver l'avenir. Le Dr Cabrera veut négocier sur les moyens d' « infléchir les dépenses, car si l'on ne fait rien, ce sera beaucoup plus dur quand arrivera la réforme de l'assurance-maladie ». Ce pronostic est partagé par le Dr Pierre Costes, bien que son syndicat MG-France ne soit pas concerné par la convention transitoire. « La période est intéressante, car la manière dont on gère les choses dans les six mois qui viennent sera prise en compte dans la réforme, affirme le président de MG-France. Si on ne fait rien, conclut-il, les dépenses s'envoleront encore plus et on imposera aux médecins plus de contraintes remettant en cause des droits acquis comme la liberté d'installation et de prescription, le choix du professionnel, etc. »
Trois CPP en cours de validation
Les trois contrats de pratique professionnelle (CPP de coordination et suivi périopératoire en chirurgie et en anesthésie-réanimation, CPP pour les échographies obstétricales) sont « en cours de signature » dans les trois régimes d'assurance-maladie avant d'être transmis pour agrément au ministère de la Santé.
Selon la CNAM, les CPP à adhésion individuelle concernent potentiellement « 7 261 médecins spécialistes de secteur I » (dont « 1 637 chirurgiens et 2 024 anesthésistes ») et contiennent des mesures qui coûteront environ « 27 millions d'euros (+ 19,4 millions d'euros au titre de la participation aux primes de responsabilité civile professionnelle) si tous les médecins concernés y adhèrent ».
Outre la prise en charge du surcoût en 2003 des primes annuelles de RCP (lorsqu'elles dépassent 1 000 euros), chaque CPP prévoit une rémunération forfaitaire à partir d'un certain seuil d'activité en contrepartie d'engagements sur la qualité des soins (dossier médical) : de 4 000 à 7 000 euros pour les chirurgiens, 4 500 euros pour les anesthésistes, et de 2 000 à 4 000 euros pour les spécialistes réalisant des échographies obstétricales.
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