Arts
Le rôle des poètes dans la révélation de l'art contemporain s'est affirmé depuis Baudelaire et surtout Apollinaire. Dans le contexte du surréalisme, une complicité peinture-poésie s'est élaborée. Robert Desnos fut un artisan de cette aventure. Deux peintres en témoignent.
« Dans cette description précise d'un monde aussi possible qu'imaginaire, il y a, présente et bien réelle, une atmosphère dont le spectateur ne saurait se lasser et qu'il ne saurait oublier. » Desnos nous introduit d'emblée dans le monde mystérieux et fascinant de Labisse sur lequel il a écrit les lignes les plus décisives. Un autre commentateur proche du surréalisme, Patrick Waldberg, affirmait qu'au « royaume inquiétant de Circé et d'Omphale, Labisse, de droit divin, occupe la charge de Grand Enlumineur ». On l'aura compris, ce peintre est un faiseur d'images chargées de sens, où l'ambiguïté entre pour beaucoup dans le charme qu'elles peuvent exercer sur le spectateur. Il a d'ailleurs exposé une série d'uvres sous le label « Faiseuses d'histoire ». Sa participation à l'univers illusoire du théâtre comme décorateur s'en trouve justifiée. Il a travaillé avec Jean Louis Barrault (« Partage de midi », de Claudel, « le Procès », de Kafka, « le Diable et le bon dieu », de Sartre). La femme règne superbe et diabolique dans son uvre. Ce seront les figures de la mythologie, dont cette Andromède magnifiée dans un ouvrage de bibliophilie qu'il concocte avec la complicité de Robert Desnos.
Espaces marins
Proche de lui, dans la même sphère poétique, Lucien Coutaud a, également, collaboré avec Jean-Louis Barrault comme décorateur de quelques-uns de ses plus fameux spectacles, dont « le Soulier de satin », de Claudel. Lui aussi fréquente les poètes surréalistes et Robert Desnos, attentif à son travail que scandent des uvres-clefs placées sous le signe de Kafka, de Raymond Roussel, dans un décryptage aussi aigu que vertigineux des rêves, dans la grande tradition du surréalisme, sans pour autant (tout comme Labisse) chercher l'aval d'André Breton ni s'associer aux activités du mouvement, dans un souci de conserver une liberté de pensée et d'action. Ayant fait l'acquisition d'une propriété face à l'estuaire de la Seine, baptisée « Le Cheval de Brique », Coutaud, à partir de 1953, multiplie les uvres qui s'en inspirent.
Espaces marins
Vastes espaces marins, comme dans l'uvre de Tanguy, où errent, en cortèges singuliers, processions insolites, des femmes-fleurs faisant la synthèse entre sa manière si particulière de composer un corps avec des éléments distincts finement découpés, et la grâce un peu ambiguë de la fleur en ses coloris rafraîchissants. Une rencontre tout à fait insolite de cruauté et de douceur, de fierté et de suavité, qui confère à ces compositions répétitives, obsessionnelles, une force hypnotique qui fait écho à la technique de Chirico, créant un monde stupéfiant et théâtral.
« Labisse », rétrospective. Musée des Beaux-Arts-Palais Carnolès à Menton. Jusqu'au 21 janvier.
« Lucien Coutaud : Les années du Cheval de Brique 1950-1970 ». Galerie Minsky, 46, rue de l'Université, Paris. Jusqu'au 2 février.
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