J’EXPLIQUE
-› Les douleurs neuropathiques du diabète sont consécutives à des altérations des nerfs périphériques des membres inférieurs, préférentiellement les nerfs sensitifs. Le message nerveux est perturbé, tant dans sa perception que dans sa restitution. En effet, chez le patient diabétique, l’irrigation sanguine des nerfs est diminuée car les capillaires qui les traversent subissent des processus thrombotiques. De même, le tissu conjonctif nerveux est altéré dans sa structure, épaissi, perturbant la propagation de l’influx nerveux. Plusieurs mécanismes chimiques intriqués les uns aux autres expliquent l'effet toxique de l'hyperglycémie sur les cellules nerveuses (stress oxydatif, accumulation du glucose dans les neurones, facteurs immunologiques, l’insuline, …) mais il est à l'heure actuelle impossible de déterminer l'importance de chaque mécanisme dans l'histoire naturelle de la neuropathie.
-› Quand le diabète est dépisté, près de 10 % des sujets présentent déjà des lésions nerveuses asymptomatiques de neuropathie diabétique. Elle se caractérise par une atteinte bilatérale et symétrique débutant à l’extrémité distale des membres. Sa progression est ascendante. La polyneuropathie se manifeste la plupart du temps par des paresthésies (sensations anormales non douloureuses) et des dysesthésies (sensations anormales toujours désagréables). Les symptômes sont fonction des fibres atteintes. Les petites fibres sont les premières à être touchées et correspondent à la perte de la sensibilité douloureuse et thermique. L’atteinte des fibres moyennes et grosses correspond à la perte de la sensibilité vibratoire, du tact fin, de la sensibilité proprioceptive (sens positionnel du gros orteil) et à l’abolition des réflexes ostéo-tendineux.
-› Environ 20 % des patients diabétiques souffrent de neuropathie.
JE PRESCRIS
-› Le contrôle du diabète doit être aussi rigoureux que possible pour limiter l’aggravation de la neuropathie. Les facteurs de risque majeurs de la neuropathie sont le contrôle glycémique insuffisant et l’ancienneté du diabète.
-› Aucun examen complémentaire n’est nécessaire pour le diagnostic qui est exclusivement clinique.
-› L’atteinte spécifique du système nerveux justifie que le traitement diffère des antalgiques classiques usuels, pas ou peu efficaces. Les molécules efficaces sur la douleur neuropathique sont des produits qui sont classiquement prescrits dans d’autres indications :
- Les antiépileptiques : la gabapentine ou la pregabaline. Initiée à faible dose, la posologie est augmentée par paliers en fonction de l’efficacité et de la tolérance individuelle. Des effets indésirables sont possibles : somnolence, impression vertigineuse et parfois prise de poids.
- Les antidépresseurs. Les tricycliques (amitriptyline par exemple) sont souvent efficaces mais leur sécurité d’emploi limite leurs indications chez les diabétiques (maladie cardiovasculaire, sujets âgés). On leur préfère les inhibiteurs de recapture sélectifs de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNa), en particulier la duloxetine qui a l’AMM.
- L’association antiépileptique et antidépresseur est justifiée en cas d’efficacité insuffisante.
-› La prescription de tramadol est possible, celle d’opioïdes forts n’est proposée qu’en dernière intention après échec des associations.
J’ALERTE
-› Le délai d’action des traitements peut être retardé (plusieurs jours à plusieurs semaines).
-› L’antalgie est le plus souvent partielle. La douleur est encore présente mais moins gênante. L’efficacité est aussi jugée sur l’amélioration du sommeil, de l’anxiété, et de la qualité de vie.
-› Attention à la deuxième complication de la neuropathie : le pied diabétique. L’apparition de troubles sensitifs doit faire redoubler de vigilance.
-› La présence de lésions nerveuses périphériques peut s’accompagner d’atteintes proximales ou du système nerveux autonome dans son ensemble dont l’évolution n’est pas toujours parallèle à celle de la neuropathie diabétique.
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