La couverture du livre est explicite : « À qui la faute ? » a été écrit par Sophie Tolstoï pour répondre au fameux texte de son mari, « la Sonate à Kreutzer ». Publié à l’occasion du centenaire de la mort de Léon Tolstoï, ce récit, qui n’a été édité en Russie qu’en 1994, dans la revue « Octobre », est traduit pour la première fois en français. On dispose donc, via des fictions, des deux versions de la mésentente conjugale.
« La Sonate à Kreutzer », dont l’action se déroule dans le compartiment d’un train, commence par une conversation qui tourne autour de l’amour, du mariage, du divorce, des unions arrangées ou fondées sur un véritable amour ; bientôt, l’un des voyageurs confie au narrateur qu’il a tué sa femme et explique les raisons qui ont entraîné ce drame. Les mots de ce récit « sur l’amour charnel, sur les relations sexuelles dans la famille » sont sans ambiguïté et ont la force propre à l’auteur de « Guerre et paix ».
Son épouse Sophie Andréïevna Behrs – qui lui a donné 13 enfants et l’a aidé tout au long de sa vie dans sa carrière littéraire en lui servant de secrétaire et de copiste – y a vu une attaque personnelle, justifiée par leurs relations tumultueuses : « J’ai moi-même senti dans mon cœur que ce récit était dirigé contre moi, il m’a immédiatement occasionné une blessure, m’a humiliée à la face du monde entier et a détruit le dernier amour entre nous. » D’où son intention de se battre sur le terrain même où il ne connaît pas de rivaux, la littérature.
« À qui la faute ? » a pour héroïne une jeune fille sentimentale qui, très courtisée, choisit pour mari le comte Prozorski, âgé de 35 ans (Tolstoï avait 33 ans et Sophie 18 lorsqu’elle l’a épousé), qui lui fait une cour assidue. Le désillusions surviennent dès le mariage lorsque son rêve d’amour pur est confronté à la bestialité masculine.
Alors que, dans « la Sonate à Kreutzer » – dont une nouvelle traduction est proposée la seconde partie du livre – Léon Tolstoï pose des questions universelles, Sophie Tolstoï, dans « A qui la faute ? », loin de chercher la vérité, essaye de démontrer à son mari et « au monde entier » qu’il est le seul et unique responsable de tous les écueils de leur vie familiale. Encore une différence fondamentale !
Albin Michel, 334 p., 19 euros.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature